Extrait du journal

élevée à sa guise, se dédommageant ainsi d'avoir laissé mettre au couvent deux filles plus âgées. La vaste intelligence de M. Darmont se prêtait à toutes les audaces de la science moderne. Sans chercher de parti-pris à pénétrer sa fille Hermine de ses propres convictions, il les lui communiqua en l'associant de bonne heure aux recher ches, aux convei'sations, aux travaux les mieux faits pour détruire dans son cœur le germe de la foi. Hermine, comme la Sophie de Rousseau, ne connut de la religion que les simples préceptes de morale qui, dégagés du dogme, peuvent servir à la sa gesse humaine. Plus tard, cependant, de meurée seule au monde, vaincue peut-être par quelque chagrin secret, elle éprouva le besoin d'un point d'appui consolateur ; ce jour-là, elle entra dans la vieille église du village, s'y agenouilla et depuis revint fidèlement à cette même place. Quelque chose semblait changé en elle : la force sûre d'elle-même était devenue, dans cette âme évidemment brisée par un coup invisible, de la résignation, et il en résultait, au dire de ceux qui l'avaient observée alors, un charme nouveau, doux, attendri, plus féminin, qui sans cesse avait grandi pour faire enfin à sa vieil lesse prochaine une si aimable auréole. Tout petit, j'étais le neveu préféré de tante Hermine, en ma qualité d'enfant souffreteux; le malheur d'autrui l'at tirait, l'attachait : elle • entreprit de faire de moi un garçon joyeux et bien por tant. L'air vivifiant du pays uû peu âpre qu'elle habitait l'aida dans cette tâche. Je dus la santé aux vacances que je passais à Orehamps. Les jours de beau temps , nous nous promenions en semble, et de ces courses vagabondes à travers bois il m'est resté un ba gage de connaissances variées, plus pré cieux que celui de mes années de collège....