Extrait du journal

J’ai déjà parcouru la plus grande partie du chemin de la vie, et j’ose dire que, jamais dans ma carrière déjà longue, je n’ai eu d’autre passion que celle de la République, d'autre idée que celle de la mise en pratique des grandes et généreuses idées de la Révolution. Je puis, non sans orgueil, mettre au défi quiconque, vieux ou jeune, de prouver que je n’ai pas servi, avec un dévouement et un désintéressement absolu, les idées qui illuminèrent le monde à la fin du siècle dernier. Mais quand je vois à quels pitres sinistres les morts d’autrefois servent de piédestal, quand je constate à quels calculs bas, misérables, obéissent ceux qui se vantent d’être les héritiers de nos ancêtres, je me sens pris d’un irrésistible dégoût, et je me demande si je n’ai pas fait de mal à mon pays en aidant, avec les forces dont je dispose, à l’avènement de ces politiciens, dont le règne marque l’abaissement des âmes et l’avilissement des consciences....