Extrait du journal

La matinée d'hier au Cirque d'Hiver battait son plein, lorsque, soudain, vers 17 h. 45, deux éléphants qui achevaient d'exécuter un numéro de leur façon, au centre de la piste, s'aperçurent qu'un vieux différend les séparait. Ils s'élan cèrent aussitôt l'un vers l'autre et, avec toutes les feintes, esquives, détentes et autres moyens de défenses propres à un trompeur pachyderme lorsqu'il attaque un autre pachyderme, ils engagèrent un duel acharné. La terre en tremblait. Le pourtour de la piste menaçait de céder sous les assauts répétés. Emouvante était la bataille. Mais grande était l'anxiété des spectateurs des banquettes qui redoutaient, pour eux et pour leurs enfants, de devenir les innocentes vic times d'un combat dont ils étaient les Impuissants arbitres. Avec peine, le cornac parvint à faire accepter aux rudes animaux, non de cesser la lutte, mais de la transporter sur un autre terrain, au vestiaire. Par les coulisses, les éléphants s'en furent donc au bar et là, avec la chaleureuse ardeur qui les caractérise, ils brisèrent glaces, verres, bouteilles et comptoir avec un entrain qui ne se ralentit pas. Le cirque en fut ébranlé jusque dans ses fondations. Aussi, devant la crainte que les indomptables animaux ne se livrassent à d'autres excès, le dompteur dut faire savoir au public qu'il était préférable de se retirer. Ce qu'il fit avec docilité. Et, à huis-clos, le combat prit fin. Ce fut, dit-on, un match nul....