Extrait du journal

Ernest Blum raille spirituellement, dans le Rappel, l’engouement des Parisiens pour la campagne et les bains de mer : Paris se vide, dit-il. Il est de bon ton, en ce moment, d’aller quelque part, n’importe où, pourvu qu’on ne reste pas dans la capitale. Celui-ci va à la mer, celui-là dans une sta tion balnéaire quelconque, cet autre se con tente d’une villégiature suburbaine. Mais le suprême bon genre e»td’êfro absent. C’est être son propre ennemi que de se pro mener présentement sur les boulevards. Hier, sans y penser (j’ai une nature décidé ment trop distraite), je me suis assis sur une chaise dans les environs du Grand-Hôtel. Un ami passe, je vais pour lui dire bonjour, mais je le vois qui enfonce son chapeau sur la tête, détourne le visage, et presse le pas sans me regarder. — Ah! bail 1 me dis-je. Je me lève et cours après mon ami. — Est-ce que nous sommes fâchés ? lui criai-je. — Chut! fit-il, je suis censé ne pas être à Paris, tu ne m’as pas vu, tu ne m’as pas ren contré. Est-ce que toi, d’ailleurs tu ne devrais pas être également loin d’ici, nous sommes ri dicules tous les deux! — C’est vrai, pensai-je. Et je m’expliquai alors pourquoi depuis que je m’étais assis sur ma chaise des boulevards, les passants me regardaient d’un air moqueur, les garçons de café me montraient au doigt,et les sergent de ville eux-mêmes me blaguaient entre eux. La model l’implacable mode! J’eus tout d’un coup la folle envie de mon ter sur un banc et de crier aux foules circu lantes : — Mesdames et messieurs, je vous fais tou tes mes excuses, j’ai oublié que nous étions en pleine canicule; mon devoir, en effet, se rait d’être partout ailleurs qu’ici, mais je ne me suis pas souvenu, je vous donne ma parole que demain je serai quelque part, je ne sais pas où, mais j’y sérail Et la vérité c’est que je n’y serai pas, parce que je ne sais pas où aller, parce que, sur le bord de la mer, il y a trop d’eau et dans les stations thermales il n’y en a pas assez. Je me contenterai de me cacher, et, idée in...