Extrait du journal

Voilà la solution anarchique qui a été donnée à la question de Syrie. * # Le traité turc nous apparaît encore plus défavorable si on l'examine au point de vue des intérêts français. Après une guerre dont la France — ü faut le dire hautement et le répéter sans cesse aux alliés — a supporté la plus lourde charge, notre pays sort-il agrandi ou diminué en OrienM ? La liquidation de l’Empire turc lui est-elle profitable ou nuisible ? Ayons le courage de le dire : la France en sort diminuée ; nous voyons ce qu’elle perd, nous ne voyons pas ce qu’elle gagne au traité. Ce quelle perd, c’est la situa tion privilégiée que les capitulations ottomanes lui assuraient depuis le xvi* siècle dans tout l’Orient, en lui re- , connaissant le protectorat des catho- ! liques. Ce qu’elle perd, c’est la Pales- , tine qui, depuis les Croisades, était sous ! notre influence séculaire ; le traité fait passer aux successeurs de Richard Cœur de Lion l’héritage de PhilippeAuguste et de saint Louis. Ce qu’elle perd, c’est le protectorat moral de l’Ar ménie qui, elle aussi, avait coutume d’en appeler à la France de la,barbarie turque et de la tyrannie russe et qui est livrée aux influences protestantes d'Amérique et d’Angleterre. Ce qu’elle perd, c’est la Syrie elle-même où elle ne reçoit rien en toute propriété, tandis que l’Angleterre prend la Mésopotamie, où elle voit se dresser en face de son influence séculaire le panarabisme et se refroidir les sympathies des peuples dont elle n’a pas suffisamment défendu l’indépendance ©t les intérêts. On nous dit que, mécontents d’un pareil traité, plusieurs membres de la Commission des Affaires extérieures de la Chambre seraient décidés à lui re fuser leur approbation. Ils ne sauraient mieux faire ' pour amener une révision qui s’impose et que l’Angleterre acceptera d’aytant plus fa cilement que les événements récents lui ont montré l’incohérence de tous ces accords et la nécessité pour elle de mar cher en union avec nous. Jean Guiraud....