Extrait du journal

_ Ceux qui doutent de l’immorta lité de l’ànie ont vraiment des yeux pour ne pas voir. Toute cette semaine, l’humanité mis son front contre ce mur d’implacable silence, qui sépare les vivants des morts. Et elle s’est posée l’inévitable question : Où sont-ils.. 7 Où est ce père.. î Cette mère.. ? Ce mari.. ? Cette femme, qui était ma femme.. ? Cet enfant., sang de mon sang... chair de ma chair.. î • Sans doute, on s’est penché sur des tombes, et pieusement on les .a fleuries. Mais, on sait bien qu’tTa ne sont pas là». Là, il n’y a que leurs restes de misère. Ce qu’on sait-, ce que croient même ceux qui ne croient pas, c’est qu'ils vivent encore. Sans quoi, nos hommages, nos fleurs tomberaient dans le vide, et n’auraient plus aucun sens. Mais, sont-ils heureux, ou mal heureux ? Se souviennent-ils encore de leurs affections d’ici-bas ? Et la foule, dont la foi n’est plus souvent qu’un pauvre feu sous tant de cendres, s’en va, dolente et sans réponse. Et puis, la vie extérieure la re prend, à la porte même du cime tière, où elle a pleuré. Vous avez vu, en certains soirs d’été, les moucherons danser dans la lumière mourante du jour.. ? Un oiseau passe et repasse, le bec ouvert, emportant, à chaque fois, ses victimes. Et la ronde, un instant boule versée, reprend sa vaine agitation. C’est l’image d’une grande partie des humains. Emportés dans la ronde infer nale des affaires terrestres, la Mort passe et repasse au milieu d’eux, enlevant, à chaque fois, sa proie. Désemparée quelques instants, cette ronde recommence autour des mêmes affaires, comme si la Mort n’existait pas. Or, la Mort, c’est la plus grande réalité de la vie. «î Faites le schéma de l’existence d’un homme moderne moyen», de celui qu’on appelle « l’homme de la rue ». Enfant, il a cru jusqu’à sa pre mière Communion. Puis, sur cette àme en fleurs, s’abattent les mauvais camarades, les journaux, les passions, les tyrannies de la vie matérielle. Et, de sa croyance, il ne va plus rien rester, ou presque rien... Une prière, de temps en temps... Une messe hâtive, le dimanche... Et encore !... * C’est dans cette absence de spi rituel que ce baptisé fait le grand voyage de la vie, respirant du laï cisme, du scepticisme à pleins bords, vivant comme si l’argent était tout... comme si, lui, devait vivre toujours. La mort, c’est pour les autres. Et puis, un jour, la mort c’est pour lui. Jour terriblç... déconcertant, parce qu’on a refusé de le pré parer, et même d’y penser. Un prêtre arrive, parfois de jus tesse ; et il fait ce qu’il peut». Pas grand’chose ! Que de fois, il n’y a même pas ce semblant de préparation. Et la Mort jette devant Dieu un malheureux qui a pensé à tout, excepté à Lui. Aussi, comme il faut prier pour les morts modernes, dont toute la vie s’est passée en dehors du spi rituel. Manger.» boire.» dormir.^ tra vailler... s’amuser.» Les bêtes en font autant La caractéristique de l’homme, qui est la prière, le moderne, en a perdu la notion, même devant la Mort Il ne voit plus l’ironie d’accu muler des couronnes sur le cer cueil d'un pauvre humain qui, sou vent n’en mérite aucune. Qu’une main discrète place un humble petit bouquet de violette® sur un drap mortuaire.» Très bien». Les fleurs ont été créées par Dieu pour ces circonstances-là. Mais ces roues de commande.» ces lourds coussins de fleurs écra sant un corps, qui a surtout besoin de prières.» quelle pitié !.. * Le chrétien a une tout autre mentalité. Pour lui, la mort est la conclu sion normale de son épreuve», le tunnel par où U faut passer», la...