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La Croix, 8 juillet 1910

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La Croix
8 juillet 1910


Extrait du journal

moelle, ai-je dit, et je ne m’en dédie pas. Ce furent les conservateurs qui l’appe lèrent au Sénat. Et ils eurent le grand tort de ne pas l’y mettre à leur tête, et lq raison de l’accident du gouvernement dans lequel il devait les persécuter est, à mes yeux, la conséquence de cette faute. Il s’était pourtant bien offert à eux lorsqu’il avait proposé à ses amis du Sénat de former un parti républicain conservateur. Oui, vous avez bien lu, un parti républicain conservateur. Il ne reculait pas plus devant les mots que devant les actes. Mais, quand il se vit préférer Ghallemel-Lacour pour la présidence du Sénat, et Félix Faure pour la présidence de la République, il en conçut une mortelle offense et se détourna d’eux. —,Ah t Us ne veulent pas de moi pour chef ; ah ! ils disent craindre que mon élévation à l’une de ces présidences soit un acte de réaction trop accentué ! (c’était là, en effet, ceux de mon âge s’en souviennent, ce qui se dit alors pour expliquer son double échec) ah ! ils ne m’ont arra ché du barreau que j’aimais, que j’hono rais, qui me donnait gloire et fortune, que pour m’asseoir obscurément dans un des fauteuils du Sénat ! Eh bien, ils seront punis. Je leur montrerai ce que j’aurais fait pour eux en le faisant pour leurs ennemis, les maçons, les sectaires et les socialistes ! Et il le fit, en effet, avec une fermeté qui n’avait rien de grand et de libéral, qui était brutale et violente. Je ne crois pas que les conservateurs, qui sont épris de justice et de liberté, l’eussent acceptée même au service de leur cause. C’est cette fermeté violente et brutale, dont bénéficièrent les sec taires, les maçons, les socialistes et les antimilitaristes, que les orateurs ont uni quement célébrée dans la journée d’hier. Pour moi, qui ai suivi de très près Waldeck-Rousseau dans sa carrière, le changement subit de son attitude, le re niement de son passé, son gouverne ment acharné à poursuivre d’une haine féroce les conservateurs dont il était, ne .^peuvent avoir.d’autre, motif ,que l’exas pération d’avoir été méconnu par eux, et la volonté de tirer vengeante de l’injure. On m’accordera qu’un pareil motif ne peut pas être rangé parmi les motifs élevés. Aussi les orateurs de l’inaugu ration de sa statue, si féconds en ana lyses, se sont-ils gardés d’analyser les causes de ce tournant de sa vie, de ce passage d’un parti dans un autre parti, de tout cet ensemble qui ne^peut pas recevoir d’autre qualification que celle de trahison de ses amis et de renie ment de son passé. L’orateur qui se serait attaché à la vérité dans une analyse consciencieuse et dans une étude approfondie, aurait dit, hier, de Waldeck-Rousseau : Cet homme était conservateur dans son origine, dans ses aptitudes, dans ses goûts, dans ses tendances, dans ses rela tions, dans sa tenue, dans ses doctrines. Pour avoir été méconnu des conserva teurs, il se fit, pendant les deux années de son ministère, au mépris de son passé comme au mépris de l’intérêt na tional, leur ennemi implacable, par tou9 les excès, par tous les abus, par toutes les violences. Il sembla s’en repentir dans son dernier discours au Sénat. On assure qu’il s’en repentit à l’heure de sa mort, et nous espérons que Dieu lui aura par donné. J. B....

À propos

La Croix est un journal catholique conservateur créé par Emmanuel d’Alzon, prêtre de la Congrégation des assomptionnistes, en 1880. Quotidien depuis 1883, il continue d'être publié de nos jours, dans une version bien moins partisane et religieuse que par le passé.

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