Extrait du journal

Je viens de passer huit jours Chez-lcsLoups. Et j’en suis revenu ! Je m’empresse de vous dire, pour vous rassurer, que « Chcz-les-Loups » est un modeste village d’une modeste commune de mon pays natal. Si je vous donne peu de renseignements sur ce pays, c’est pour vous éviter lu peine de chercher sur la carte, le lieu exact du dit village. Vous ne le trouveriez pas. Je préfère vous raconter ce que j’ai \u a Chcz-les-Loups » et peut-être par voie de déduction, arriverez-vous à trouver sa situation géographique ! Et si parfois l’i dée vous venait de le visiter, je vous sou haite de faire comme moi, « d’en reve nir ». On arrive d’abord « Chcz-les-Loups » comme on peut. Le pays étant perdu au milieu des bois, aucun moyen de communication ne le relie à la gare la plus proche, éloignée de jo kilomètres. Vingt kilomètres de la gare ! Est-il pos sible d’imaginer un pays aussi mal des servi I Tout un poème, mon voyage de va cance ! Aussi bien, je ne m’attarderai pas à vous en raconter les incidents variés. Le pays par lui-même est intéressant, pittoresque au possible. La terre en serait même assez fertile, mais là, comme ail leurs du reste, ce sont les brus qui man quent. Alors, les ronces croissent sur le terrain depuis longtemps abandonné. Çà et là des pans de murs indiquent qu’autrefois il y eût des habitants. Maintenant, c’est la tristesse qui plane sur des ruines qu’une race épuisée n’a plus la force de relever. Au cours d’une promenade, j’ai ressenti une grande douleur à la vue d’une char rue abandonnée en plein travail ; au fond du sillon inachevé, le soc était couvert de rouille, la pointe du fer était restée en foncée. sous la terre, quel drame s’était passé ? Pourquoi ce sillon inachevé et cette charrue depuis longtemps abandon née ? Autant de questions auxquelles j’aurais voulu donner une réponse. Mon âme anxieuse cherchait à éclairer le mys tère, sans toutefois y parvenir. Comme je m’abandonnais à ces na vrantes réflexions, un homme correcte ment vêtu, à la figure line et intelligente, vint à passer. Nos regards se croisèrent, il comprit que je voulais lui parler, et me devançant : — Vous êtes nouvellement arrivé au pays ? — Oui, monsieur, depuis trois jours seulement ! — Quelle est voire impression ? — Je suis étonné de voir tant de ter rains incultes, étant donné (pie le sol me paraît riche. — Votre étonnement est légitime ! — Et la cause ? — Oh I mon cher monsieur, la cause..., il faudrait dire les causes I...