Extrait du journal

Saint Vincent Ferrier, [le grand orateur dominicain, le rencontrant à Alexandrie, âgé de 22 ans, l'avait deviné dès la première entrevue, et n'avait pas hésité à proclamer du haut de la chaire que ce jeune moine serait un jour pour l'Italie ce qu'il était en ce moment lui-même pour la France. A cette époque où le journal n'existait pas, où le livre était rare, il n'y avait guère que la parole publique qui pût former l'opinion et le prédicateur exerçait sur les foules une influence considérable. Afin de mieux atteindre le peuple, les Franciscains étaient sortis de l'église pour parler sur la place publique des auditeurs innombrables, jusqu'à 60000, dit-on, s'entassaient autour d'eux, les femmes séparées des hommes par de grandes toiles tendues les toits se couvraient de curieux. Pour tenir en haleine, pendant deux, trois, quelquefois quatre heures, cet auditoire accouru de tous les points de la région, les enfants sur les épaules du père ou du cou de la mère, il fallait une vigueur, une variété, des ressources infinies dont nous n'avons même plus l'idée aujourd'hui, accoutumés que nous sommes àdes imitations plus oumoins fades des prédications classiques destinées à la cour du grand Roi....