Extrait du journal
L’acte infâme publié hier ici môme dans Une gazette mérite qu’on s’y arrête. Voici le fait: Une malheureuse mère de famille subit une opération des plus graves. Le maire de la localité prend la pauvre femme en grande pitié et la fait transporter dans l’immeuble devenu vacant par suite de l’expulsion des Sœurs. Voilà donc la misérable opérée à moitié sauvée, puisqu’elle est transportée dans un local sain* bien aéré, et remplissant toutes les conditions exigées par l’hygiène. Elle sera sauvée tout à fait si on lui trouve une garde-malade experte, vigilante et dé vouée. Dette garde-malade est là, presque sous la main, dans la commune voisine. On ne demande pas. mieux que de l’appeler;, elle ne demande pas mieux que de venir. Qui donc pourrait supposer qu’entre ces deux volontés charitables* concourant à un même acté de charité, en puisse intervenir une troisième qui empêche la charité de s’ac complir ? Cela est pourtant ainsi. La garde-malade prête à accourir est une Sœur, une Sœur expulsée, qùi attend dans la localité voisine le résultat de la demande d’autorisation formée par sa Congrégation. Le garde-champêtre. ou le juge de paix, ou je ne sais qui, lui a dit qu’elle ne pouvait pas rentrer sans la permission du préfet dans la chère commune où elle fit tant de bien ! Elle a cru sur parole le porteur de fausse affirmation, mesurant les autres à sa taille, et ne s’imaginant pas qu’on pût mentir. . Elle a cru, et elle attend patiemment les décisions que lui ménage le bon plaisir de M. Combes, n’osant franchir les limites de sa commune. Le maire veut lever ses scrupules ; il écrit au préfet pour lui demander l’autorisation de sauver sa malheureuse administrée en la faisant soigner par la Sœur expulsée. Et savez-vous ce que répond le préfet? — Que ton administrée crève, s’il le faut; mais la garde-malade qui la sauverait n’ap prochera pas d’elle. Vous comprenez bien que pareille cruauté peut être inventée par uh homme; elle ne peut être inscrite dans une loi. . Le préfet ne peut pas dire : Au nom de la loi, cette cruauté sera. Il ne peut pas davantage se mettre à l’abri d’un décret. Il est obligé de dire piteusement : Pour obéir aux instructions ministérielles, une femme périra. « Monsieur le maire, écrit-il, lesinstructions ne permettant pas aux religieuses dont lés établissements ont été fermés de rester sur place, il ne m’appartient pas d’accorder la faveur que vous me demandez. » Ah! cela ne vous appartient pas, Monsieur le préfet. Cela n’appartient pas plus au mi- _ nistre, cela n’appartient à personne;, car ce i n’est pas une faveur de sauver un être qui souffre, c’est un (droit qu’on tient de son cœur, et nul ne peut s’opposer à son exer cice ni l’entraver ! Le gouvernement a pris l’habitude d’ef frayer les gens en leur disant » . Vous ne pouvez pas faire ceci, vous ne pouvez pas faire cela. Et les gens ne font ni ceci ni cela. Mais, en vertu de que! texte législatif ou administratif cette prohibition? Le gouver nement ne le dit pas. Eh bien, qu’on le sache enfin, nous ne devons obéissance qu’à la loi. Quant aux « instructions ministérielles », elles ne sont faites que pour les préfets et sous-préfets. Elles ne regardent pas les citoyens libres. Que notre bonne Sœur suive donc l’impul sion de son cœur : qu’elle sauve la pauvre mourante. Le préfet n’a pas plus le droit de l’en empêcher que, si je me noyais dans les...
À propos
La Croix est un journal catholique conservateur créé par Emmanuel d’Alzon, prêtre de la Congrégation des assomptionnistes, en 1880. Quotidien depuis 1883, il continue d'être publié de nos jours, dans une version bien moins partisane et religieuse que par le passé.
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