Extrait du journal

La persévérante vigueur avec laquelle nous avons toujours flétri ici le duel et les duellistes, fussent-ils nos amis, nous impose de relever et de juger la situation faite par le duel tragique d’hier. Un certain nombre de journaux, qui méprisaient les enseignements si formels de l’Eglise et ses anathèmes sur le duel, traitent aujourd’hui ces combats d’actes de sauvagerie. * . , • * En cela ils sont enfin d’accord avec l’Eglise, mais ils ne vont pas assez loin, c’est plus que de la sauvagerie. Le duel oblige l’homme à commettre un acta de sauvagerie, mais il oblige à cela pour les motifs les plus futiles et sous les peines les plus effroyables. En effet, si l’homme provoqué au crime reste fidèle au devoir et à là conscience, il doit briser son épée s’il est soldat, sa plume s’il est écrivain dans « la grande presse », et il ne peut plus paraître dans les salons de « la société. » Devant ce déshonneur qui le rendrait odieux même aux siens, le jeune chrétien faiblit, et commet la lâcheté de brûler de l’encens d’apostat devant la déesse de l’opinion. . Cette contrainte morale est plus odieuse què l'acte lui-même de sauvagerie, car les supplices des Néron et des Dioclétien, pour faire apostasier, étaient moins dangereux, j’oserais dire moins cruels, que la torture organisée dans le monde en faveur du duel, et ici les tortionnaires, hommes et femmes, méritent tous nos mépris. • * * Naguère, un officier a eu le courage, insigne parce qu’il est rare, de refuser le combat honteux etr criminel qu’on voulait lui imposer au nom de l’honneur. Une lâcheté imposée au nom de l’hon neur ! telle est la vraie définition du duel. Cét officier s’est retiré de l’armée, le front haut, mais son acte héroïque n’a pas été admiré parle monde mondain; les chré tiens se sont tus. Il en est bien autre ment lorsqu’un jeune élève, fraîchement sorti des bancs du collège catholique, n’ose pas refuser une affaire d’honneur et foule aux pieds toutes les promesses de sa foi pour s’égratigner sur le pré; chacun alors lui sourit et les matrones chrétiennes sont fières de donner leurs filles à cet homme qui a été infidèle à son Dieu pour com mettre la lâcheté de plaire au monde. ' * » • Quelques-uns estiment qu’on devrait appeler ici courage, l’audace qui fait affronter un combat. Noû certes, ce n’est pas du courage, ce n’est pas même de la férocité qui est le courage des bêtes, c’est une faiblesse qui fait commettre une mauvaise action pour la galerie et qui oblige indirectement les autres à imiter le péché. » * A quoi servirait-il de dissimuler cette vérité? Je vais vous le dire. Dissimuler la vérité sur le duel, cela sert à laisser subsister une mode qui apporte à la sauvagerie les raffinements de la civili sation. Dissimuler la vérité sur le duel, cela uermet aux tortionnaires cQii tuent les...