Extrait du journal

Ce monde du journalisme, qui fait les lois de l’honneur, se bat en duel, se fait; donner des entrées dans toutes les dé bauches, ne néglige pa3, d'autre part, les profits de la réclame payée en nature ou en argent. ; Quand un renseigne*»®11* odieux, un papier dangereux tombe aux mains de ces hommes de lettres, on le rapporte très exactement; maison le fait souvent payer fort cher à son propriétaire. Un des plus grands journalistes du bou levard avait gardé des manuscrits d’un ami, et celui-ci ayant fait, au bout de bien des années, un très riche mariage inespéré, le grand journaliste voulut lui revendre ses manuscrits dans lesquels le vieil auteur avait, de sa main, tracé son propre éloge. S’il ne rachetait pas avec l’argent de la dot, on allait autographier l’écriture des éloges si considérables qu’il s’était donnés. On marchanda; si j’ai bon souvenir, c’était dix mille francs qu’on demandait. • Le journaliste reporter entre dans les maisons sous les prétextes les plus auda cieux, parfois avec des faux noms, affecte d’être de l’avis de la victime qu’il veut trahir, arrache des secrets, invente, et si l’on réclame, déclare qu’il n’y avait pas de témoins et qu’il a dit vrai. On en a en bien des exemples en ces derniers temps. Le bon journaliste est souvent celui qui ment avec plus d’aplomb, celui qui achète les secrets avec le plus d’escroquerie: iïa sur la vérité des notions absolument spé ciales. , ■ • Encore une fois cet homme néfaste, qui, par entrainement professionnel, offre le moins de garantie morale, qui rit de tout, n’étudie point, passe ses nuits dans les lieux de plaisir, c’est l’instituteur de la nation. Il s’est installé comme maître laïque, obligatoire, et nul ne lui échappe; quand on disait que l’école prussienne nous avait vaincus,il eût été plus juste de dire: que c’était l’école de la presse qui nous avait anéantis. Certes, il y a de nobles exceptions en cet état dangereux, nous ne l’ignorons pas ; il y a même parmi ceux que nous si gnalons des degrés bien divers; néanmoins l’abandon de l’intelligence de la nation'à ces anonymes assis, jour et nuit, autour des encriers, pour distiller l’erreur, le vice et souvent la calomnie, est un châti ment semblable à celui qui atteint l’ou vrier malade à l’hôpital. Il est forcément...