Extrait du journal

du jury l’aime qui donna la mort au malheureux président Carnot. Retirée de sa gaine de velours bleu, la lame, qui mesure seize centimètres et demi de longueur, apparaît encore légèrement teinte de sang. La pointe cassée s’est émoussée en tombant sur le pavé Ce poignard a été fabriqué à Thiers, bien qu’il porte la marque de — Prenez garde, messieurs les jurés, de ne pas froisser la lame, dit le prési dent ; c’est une relique, un souvenir, qu’on désire conserver précieusement. (Sensation.) Caserio raconte alors les péripéties de son voyage de Cette à Lyon. Il vient en chemin de fer de Celte à Vienne, où il an ive vers dix heures du matin. Il achète le Lyon républicain, y découpe le programme des fêtes de Lyon qu’il met soigneusement de côté. Le reste du journal sert à envelopper la poignée de l’arme, qui dépassait trop de sa poche. A cause de la chaleur, il tenait sa jaquette déboutonnée. D. Vous buvez du café avec votre ami Arcelin et vous allez chez la femme Berger, puis chez le coiffeur, où vous vous faites raser. Il était une heure et demie environ. Vous dites que vous alliez chercher du travail à Lyon. Vous faisiez donc vos visites aux an ciens camarades ? R. Oui. D. Vous pensiez que vous ne les re verriez plus ? R. Oui, monsieur. DERNIÈRE ÉTAPE Enfin, Caserio fait le récit de sa der nière étape. A son départ de Vienne pour Lyon, il achète deux sous de pain, un paquet de tabac et fait ta route en fumant des cigarettes. Quand il arrive devant le palais du Commerce, où avait lieu le banquet offert au président de la République, il est a peu près huit heures. D. Vous n’avez pas eu l’idée de ch an ger vos projets Vous n avez pas réflé chi. à ce moment, vous, dont le père fut une victime des Autrichiens, au jour où l’on se trouvait ? C’était cepen dant une date mémorable, c'était le 24 juin, qui est une fête pour les Italiens. Cette date rappelle l’époque où !e sang des Frai çais et des Italiens coulait à flots dans les plaines de la Lombardie : c’était l’armivcrsa re de la bataille de Solférino 1 (Vive sensation dans l’audi toire.) Mais Caserio de riposter : « Président, c’était la fête de la guerre civile. » (Bruit prolongé.) Le président. — En France, vous avez trouvé l’hospitalité, du travail, et vous y avez apporté la vengeance et le deuil. R. Je suis venu directement pour l’exécution de mon œuvre. (Bruit.) LE DRAME Caserio raconte ensuite, sur la de mande qui lui est laite par le président la scène du drame tragique dont la rue de la République fut le théâtre : — Tout était illuminé, dit-il, quand...