Extrait du journal
La force n a pas eu raison de la loi ! Eprouve de force, soit ! Mais on savait bien que force resterait à la Loi : car elle s'impose à tous les citoyens. C'est, du moins, la règle en régime démocratique. Alors, pourquoi cette grève, qu’on nous dit ne pas être une grève politique, quoiqu'elle n’ait pas de motifs corpo ratifs ? Il est vrai qu’on évoquait la grève générale du 12 février 1934. Pardon, en février 1934 l’ordre public et la souvera^f .é nationale avaient été mis en péril. La réplique était légitime. Mais, en quoi les décrets-lois du 12 novembre sont-ils attenta toires à la souveraineté populaire. Le Parlement a délégué ses pouvoirs au Gouvernement pour une période déterminée. Le Gouvernement en a usé. S’il en a fait abus, il aura à en répondre devant lui. Car on admettra bien qu’il y a encore un Parlement en France. On veut que ce soit le droit des ouvriers de ne pas admettre les décrets-lois et de cesser le travail pour protester contre eux. Admettonsle. Mais, alors, poussons le raisonnement jusqu’à l’absurde, et supposons que les décrets-lois n’aient frappé que les possédants, les patrons, les chefs des grosses entreprises. Admettrait-on qu’ils ripostent en fermant leurs usines et manufactures ? Ce serait de la folie pure. C’est cependant ce que nous avons failli voir. Sous prétexte que les décrets-lois de M. Paul Revnaud n’ont rien d'agréable — fussent-ils signés Vincent-Auriol que c’eût été la même chose — arrêtons tout, paralysons tout, saccageons tout. chez. Renault et ailleurs, au risque de prolonger inconsidérément la fermeture des usines et d’imposer à des dizaines de milliers de travailleurs des pertes de salaires autrement importantes que les nouvelles charges résultant des décrets-lois ! Non, les ouvriers, pas plus que les patrons, n’ont tous les droits. Personne, en tout cas. n’a le droit de violer la loi républicaine, et c’est la violer que do vouloir paralyser la vie sociale du pays. Voilà pourquoi le Gouvernement s’est trouvé dans la stricte et légitime obligation de prendre les mesures que commandaient les circonstances. On a dû user du droit do réquisition, forgé par M. Léon Blum en juin 1936 : c'est fâcheux. Mais il n’est pas douteux que si le mouvement était parti de l’autre côté de la barricade, ce sont les usines qui eussent cté réquisitionnées, surtout si les agents de Staline avaient été au pouvoir. Et peut-être n'y aurait-il pas eu, dans ce cas, que la réquisition ? Au demeurant, tout s’est bien passé : la vie sociale n’a pas été suspendue, aucun incident grave ne s’est déroulé sur l’ensemble du territoire, et c’est heureux pour ceux qui auraient eu à payer les pots cassés, car un peu partout on a vu les meneurs et les rodomonts se défiler prudemment. Toujours l’éternelle histoire : faites ce que je dis, et non ce que je fais ! Dans son discours radiodiffusé d’hier soir, le Président Daladier a pu se féliciter, au nom de la France républicaine, des résultats de son action énergique. Son autorité, dans le pays et dans le monde, en est renforcée d’autant. Il s’agit d'en profiter, non point pour brimer le monde du travail, ce à quoi personne ne songe, mais pour mater certains factieux qui on prennent décidément par trop à leur aise. S'il est exact que le principe d’autorité ait été quelque peu démis sionnaire depuis trop longtemps, il est urgent de le restaurer et de lui rendre sa véritable physionomie, qui est avant tout d'obtenir de tous, petits et grands, l'obéissance aux lois. La tentative avortée de grève générale révolutionnaire, pour des fins staliniennes, n’aurait-elle servi qu'à cela, que ce serait déjà quelque chose....
À propos
Fondée en 1893, La Dépêche du Berry était un journal régional suivant une ligne éditoriale de centre-gauche, ou « radicale ». Il paraît jusqu'en 1944.
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