Extrait du journal

Le crédit populaire ! Combien sa vent ce que ces mots signifient et quelle idée féconde ils expriment } C’est pourtant une :dée démocra tique par excellence, qui mériterait d’être comprise et pratiquée par tous. Le crédit populaire est le crédit pour les petits ; pour ceux qui ayant peu ou point de bien au soleil, n’ont d’autre gage à fournir que leurs bras, leur amour du travail et leur probité. C’est, en un mot, le crédit pour ceux qui en ont le plus besoin. A cette définition, je vois sourire certains sages. Ils me diront : toute confiance, partant tout crédit, sup pose une garantie. Ceux qui ne peu vent présenter cette garantie sont peut-être de forts braves gens, mais ils ne méritent pas de crédit. Il sem ble bien que l’objection soit juste. Et elle l’est si on veut parler du crédit réel, de celui qui repose sur l’hypo thèque ou sur un gage matériel. Mais le crédit personnel est-il im possible } L’expérience prouve le contraire. Le crédit populaire existe, il pros père en Allemagne et en Italie. Chose plus surprenante, on le rencontre même en France dans quelques dé partements. Le malheur est que, dans les autres, on l’ignore à peu près complètement, Tâchons donc de le faire connaître. Un exemple vaudra mieux que toutes les définitions. • * Je le trouve dans une modeste Îjublication que je voudrais voir entre es mains de tous nos députés et de tous nos conseillers généraux, le « Bulletin du crédit populaire de juin 1807. Dans une petite commune du Pasde-Calais, un ménage d'ouvriers agricoles, de sept membres, n'avait pour toutes ressources que le travail peu rétribué du père et les produits d’une vache, d'une valeur de 250 fr., prise en location pour 50 francs par an, soit au taux de 20 pour cent. La caisse de crédit de cette petite com mune a prêté 300. francs à ce ménage qui a pu cesser cette location onéreuse acheter une vache de 250 francs et deux porcs pour 50 francs. Les pro duits de ces animaux, l'engraisse ment des porcs ont amené l'aisance dans ce foyer rural, où s'était installée l'usure, et pour cela il a suffi d un prêt de 300 francs. J'entends bien qu’un pareil crédit suppose chez l’emprunteur des quali tés de labeur, d’épargne et de mora lité qui doivent être connues du prêteur- Comment faire pour cela ? Sans doute si on fonde à Paris, ou dans quelques grandes villes, une grande banque, nationale ou privée, chargée de distribuer des prêts à ceux qui en sont dignes, on risque fort de n'aboutir qu'au déficit ou à la faillite. Placée trop loin et trop haut, elle opérera au hasard. Mais il en va tout autrement si c’est une caisse rurale qui s’organise dans une commune, et si elle est coopérative, c’est-à-dire, si elle ne fait crédit qu'à ses co-participants. Alors, elle ne prêtera qu’à bon escient. Sa confiance ne risquera pas de s’égarer. Et le débiteur tiendra à se libérer, car dans ce cercle restreint manquer à son engagement, c’est l’exclusion et le déshonneur. Ainsi, le crédit populaire suppose une caisse créée dans une circons cription de peu d’étendue ; ou les prêteurs sont solidairement respon sables de l’insolvabilité de l’emprun teur ; où l’emprunteur offre pour premier gage son honorabilité. C'est le crédit personnel, mutua liste et coopératif. , . • * * H y a là une œuvre de véritable solidarité sociale. Elle réussit à l’é-f tranger, pourquoi pas chez nons ? Il suffirait qu’elle fut connue et propagée.Le parti républicain devrait tenir à honneur de faire cette propa{;ande. M. Méfine a prononcé, dans 'interpellation sur la crise agricole, ces paroles profondes : « Un jour viendra, qui n’est pas loin peut-être, ou les ouvriers des...