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La Dépêche du Berry, 23 mai 1937

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La Dépêche du Berry
23 mai 1937


Extrait du journal

Le Sénat ne badine pas avec les questions qui touchent les intérêts du monde rural. Il l'a fait sentir, dès la rentrée, en sc refusant à ratifier 1 ordre du jour pur et simple, accepté par le Gouvernement, sur l'in terpellation de M. Thibault ayant trait à l'application du décret sur la semaine de 48 heures aux corporations ouvrières des campagnes. Fina lement. la Haute-Assemblée s'est ralliée à une formule * invitant le Gouvernement à n'appliquer cette mesure qu'avec le plus grand libéra lisme. *> Un se doute bien de l'émotion dont ont été saisies nos campagnes, désolées déjà, soit par les intempéries, soit par le manque de maind'œuvre et son prix excessif, à l'annonce de l'application possible, après les-48 heures, de la semaine de 40 heures. Le problème est double et extrêmement délicat dans les deux sens : d'une part, on argue que les campagnes se dépeuplent parce que les travailleurs de la terre n'ont pas les mêmes avantages que ceux des villes. Mais, d’autre part, si on applique à la culture, sans transition et sans préparation, la législation sociale dont bénéficie l'industrie, on peut bien dire que c'est sa mort sans phrases. C'crt que les travaux culturaux sont des travaux saisonniers par excellence : c'est le temps qui commande, et, bon gré mal gré, il faut : "incliner devant ses exigences. Nous no songeons pas un seul instant à prétendre qu'il n'y ait rien à faire en faveur des ouvriers des campa gnes. Mais il y faut de la mesure, et il ne faut surtout pas oublier que la masse des petits propriétaires, fermiers ou métayers, en un mot la masse de veux qu'on appelle les « bounhoumes » sont aussi intéressants, disons le mot : aussi malheureux que les ouvriers agricoles dont ils partagent le dur et ingrat labeur. Leur condition difficile s'aggravera encore du renchérissement des instruments aratoires, des fournitures et autres prestations artisanales, résultant de l'application de la semaine de quarante heures aux corpo rations rurales : forgerons, maréchaux ferrants, bourreliers, menuisiers, maçons, etc... Et comme les produits de la terre ne sont encore qu'incomplètement revalorisés, et comme nos cultivateurs ne trouvent plus de main-d'œuvre appropriée, et qu'on leur refuse l'introduction d'étran gers. il n'est pas très difficile de se rendre compte de ce qui adviendra, ("est que. de plus on plus, les ruraux — dont les lits, d'ailleurs, ne veulent plus faire un métier de galérien — abandonneront leur exploi tation et que la terre demeurera en friche. Alors, cpie deviendrons-nous ? Notre domaine colonial n'étant pas suffisamment mis en valeur — et. du reste, échappera-t-il à la même magic ? — nous ne pourrons plus suffire à nos besoins et nous serons obligés d'acheter davantage à l'étranger. Oui, mais, alors, que deviendra à son tour notre balance commerciale, déjà si mal en point, comme nous le démontrions dans notre dernier article. Toujours le cercle vicieux, le fameux <■ cycle infernal », dont on a déjà parlé en ce qui concerne les salaires et les prix, et dont il n'y a décidément pas moyen de s’évader ! Et. malheureusement, ce qui est rigoureusement vrai pour les paysans, ne l'est pas moins pour un très grand nombre de commerçants et d'industriels qui, aujourd'hui, travaillent à perte pour essayer de tenir tête à la concurrence étrangère et à toutes les formes de dumping dont M. Léon Blum annonçait récemment, à la Chambre, qu'il faudrait bien se résoudre à le combattre par quelques rajustements douaniers dont nous ne pensons pas grand'chose do bon, parce qu'ils provoqueront inévitablement des représailles de la part des pays touchés. Le dérèglement actuel des choses est tel. dans tous les domaines, uu'on sc demande par quelle aberration le Gouvernement y ajouterait le mécontentement de nos campagnes, dont l'inquiétude grandit chaque jour. Ce serait une insigne maladresse et nous voulons encore croire que nos dirigeants feront tout pour l'éviter. Et tout ceci nous amène à conclure, une fois de plus, qu’il faudrait tout de même revenir à la saine raison. A vouloir tout exagérer, on finira par tout détraquer. DE CANDÉ EN AMÉRIQUE...

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Fondée en 1893, La Dépêche du Berry était un journal régional suivant une ligne éditoriale de centre-gauche, ou « radicale ». Il paraît jusqu'en 1944.

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