Extrait du journal

L'enquête de la Cour de cassation a déjà élucidé bien des points obscurs de l'affaire Dreyfus-Esterhazy-Picquart. Il est établi sans contestation possible que le bordereau est d'Esterhazy. Je sais que beaucoup de gens se demandent encore si ce document est le témoignage d'un acte de trahison caractérisé, ou s'il n'aurait pas été plutôt fabriqué par ordre de M. de Boisdeffre (ainsi qu'Ester h azy cherche à le faire croire) dans le but de masquer, grâce à cet artifice, des pièces probantes qu'on ne voulait pas montrer, par crainte de déchaîner la guerre. Cette histoire a eu cours dans beaucoup de journaux, mais tout le monde reconnaît aujourd'hui son caractère de légende. Si l'on écarte les faux, le dossier secret ne renferme aucune pièce contre Dreyfus. Le gouvernement, d'ailleurs, a résolu de le livrer intégralement à la Cour de cassation, après avoir pris les précautions nécessaires pour que les noms de certains agents et les informations sur quelques-uns de leurs actes n'arrivent point jusqu'au publÍc. En outre, on regarde comme indiscutable que les pièces citées dans le bordereau ont réellement été livrées à Berlin, avec beaucoup d'autres. Le bordereau peut donc être regardé comme la marque d'un acte certain de trahison, et tout paraît bien tendre à démontrer que la trahison venait de l'état-major. t |...