Extrait du journal

' 7 Comment ne pas tenir compte de cet état de choses quand on veut porter un jugement sur l'âme d'un baron Reille ou d'un Rességuier ? Ils sont fantasques, violents, absolus, parce qu'ils sont : les maîtres, parce que le gouvernement leur est soumis, aujourd'hui comme hier, parce que rien ne tient leur pouvoir en échec, parce qu'on leur livre la masse souffrante à merci. Il n'y a pas d'autre mystère, Est-ce que les chefs de la République ont rien fait pour leur inculquer l'idée que les temps étaient changés, que les pouvoirs publics ne pouvaient plus s'abaisser à l'ofnce d'instruments de contrainte au profit des patrons contre les ouvriers, que les travailleurs avaient un droit égal au bénéfice des lois, qu'ils se concerteraient librement pour la défense de leurs intérêts et que, s'il y ayait conflit, l'Etat ne jetterait plus comme autrefois son épée dans la balance? Non, sans doute. Et alors, pourquoi les grands seigneurs de l'industrie, qui ont jusqu'ici disposé des fonctionnaires de la République française et de l'armée elle-même, se seraient-ils donné la peine .d'avoir raison,, quand il leur 'suffit, comme dans le passé, d'être les plus forts ? Est-ce qu'ils n'ont pas vu les préfets et les juges s'abaisser au rang de leurs serviteurs ? Est-ce qu'ils n'ont pas dû se croire les éternels détenteurs de la puissance sociale, institués de -Dieu pour contenir et châtier l'éternelle révolte des misérables ?...