Extrait du journal
Je me rappelle avoir lu dans les « Souvenirs d'un ancien Gouverneur de la Nouvelle-Calédonie », publiés il y a quelques années par « la Nouvelle Revue », une appréciation sur le rôle du missionnaire dans notre colonie qui ne me surprit pas, mais qui allait étrangement à rencontre des idées reçues. Cet ancien gouverneur n'était autre que le malheureux commandant Rivière, celui qui succomba à Hanoï. Les officiers de marine ne sont pas, en général, suspects de préjugés anticatholiques et de mauvais vouloir à l'endroit des missionnaires. Le commandant Rivière, en particulier, était loin d'être un librepenseur. Il avait des sentiments religieux très accentués. Mais c'était un homme de bonne foi et qui racontait en toute sincérité ce qu'il avait vu. Or, il était très sévère pour les Pères Maristes qui travaillent, en Nouvelle-Calédonie, de leur état de missionnaires. Il racontait que ces moines paraissaient très peu empressés d'enseigner le français dans leurs écoles aux jeunes Canaques, qu'en revanche ils leur apprenaient quelques bribes de latin. Du moment que leurs catéchumènes en savaient assez pour servir la messe, cela leur semblait tout à fait suffisant, et le commandant Rivière affirmait qu'à son grand étonnement il avait trouvé dans la Mission un élément hostile à l'influence française, à la colonisation. Le moine voyait dans le colon un concurrent, et il était enclin à opposer son pouvoir, le pouvoir religieux, : à l'autorité des représentants du gouvernement. Donc, au dire du commandant Rivière, témoin peu suspect, les révérends Pères Maristes armrennent aux jeunes Canaques à servir la messe, mais ils négligent, de parti pris, de leur enseigner le français. Ces moines de la Nouvelle-Calédonie, ces missionnaires bénis du ciel ne sont pas les seuls à entendre de cette manière le développement et l'expansion de la langue française. L'année dernière, « ie Temps» a publié les impressions de voyage en Chine et au Thibet d'un explorateur du plus haut mérite, M. Marius Monnier. J'y ai trouvé le récit d'un fait bien suggestif et que M. Monnier note d'ailleurs sans paraître s'en étonner, comme chose toute simple et toute naturelle. Au cours de son voyage, il avait reçu l'hospitalité dans la Mission catholique de je ne sais Quelle ville chinoise. A son départ, les missionnaires mirent à sa disposition, pour l'aider à poursuivre sa route, comme guide et comme interprète, un Jeune Chinois converti et attaché de; puis son enfance à la Mission. Eh bien ! j cet extraordinaire interprète, qui avait vécu des années avec les Pères, ne savait pas un mot de français. Par exemple, tout comme les jeunes Canaques dont parle le commandant Rivière, il pouvait ânonner quelques phrases de [ jatin. Cela semble prodigieux, et pourtant c'est affirmé par un écrivain très sérieux qui, je le répète, n'en paraît ! pas le moins du monde surpris....
À propos
La Dépêche est un quotidien français régional fondé à Toulouse le 2 octobre 1870 sous l’initiative d’ouvriers de l’imprimerie Sirven. Par ses plumes, le journal s’inscrit dès ses débuts dans une mouvance de gauche, Jean Jaurès et Georges Clemenceau y sont très engagés politiquement par exemple, et le journal finit par s’affirmer en faveur de la révision du procès Dreyfus. Maurice Sarraut, membre du Parti radical-socialiste, en devient propriétaire en 1932.
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