Extrait du journal

Certes, nous ne confondons pas avec lui ia peignée d’aventuriers qui, appuyés sur des janissaires rouges ont usurpé l’autorité souveraine. Lénine, Trotsky, Tchitchérine, à nos yeux, sont moins qualifiés pour parler au nom du peuple russe que Napoléon III, par exemple, ne l'était pour parler au nom du peuple français, car ce dernier avait au moins pris le soin de faire consacrer son coup d’Etat par un plébiscite, tandis que les triumvirs de Moscou, qui se sont emparés du pouvoir par la plus basse démagogie, — celle que Tacite a stigmatisée dans une formule célèbre : renia servilité pro dominaisigne — ces nouveaux despotes manifestent' une telle défiance à l'égard du peuple, qu’ils lui refusent le droit de vote et qu après avoir dissous la Constituante, où ils étaient en minorité, ils n’osent pas procéder à.de nouvelles élections. Il ne serait donc ni honnête ni juste de confondre « la volonté du peuple russe » avec celle de ses dirigeants actuels. Aussi bien la (résolution de la C. G. T., que nous avons rappelée plus haut, n'est pas tombée dans cette erreur. Elle ignore le « gouvernement de fait », qui préside momentanément aux destinées de la Grande Russie. C’est « le peuple lui-même », le peuple seul, qui l’intéresse. Et elle a raison de ne s’intéresser qu’à lui. Oui, le peuple russe, tel qu’il est sorti de la révolution de mars 1917, le peuple russe qui s’est organisé, qui a su créer le puissant groupement connu sous le nom de « Soviet National des Délégués paysans », le peuple russe qui a librement élu la Constituante du 18 janvier, ce peuple qui constitue la la plus ardente démocratie du monde, est vraiment assez grand pour manifester sa volonté....