Extrait du journal
Sait-on à combien se monte la valeur du pcisson recueilli par les80.000 pêcheurs qui < x< remit leur périlleux métier sur les côtes de la France i A cent millions. Or, quelle est là-dessus, la part qui revient à nos marins ? A peine soixante millions. Quarante millions sont donc absorbés par '•hands de les «< ma reyeurs ». Ne toucher, sur un travail dont on a fourni tous les éléments sans exception, que les trois-cinquièmes de la vente, c’est déjà un joli déficit. Mais se voir ainsi ex ploité lorsqu’il s’agit d’un métier qui coûte chaque jour la vie à des vingtaines de malheureux et dont les aléas sont con sidérables. c’est une situation peu com mune, exceptionnelle par son caractère attristant. Nos 80,009 pêcheurs sont les victimes des « mareyeurs » dont tout le talent con siste à profiter de l’ignorance ou de l'iner tie des premiers pour accaparer tranquil lement la plus large part des bénéfices de la pêche, ("est le marin qui risque sa vie, ses économies, son matériel ; c’est ic « ma reyeur » qui extrait de tout cela un profit énorme, hors de proportion avec les faci lités qu’il est censé offrir aux pêcheurs pour la vente de leur poisson. Pourquoi, direz-vous, les marins ne vendent-ils pas leur pêche eux-mêmes ? Pourquoi ne délèguent-ils pas un des leurs aux centres de vente ? Pourquoi ne se mettent-ils pas en société ? Cette dernière idée est bien, en effet, la plus naturelle. Malheureusement, toute association exige de la part des associés un niveau d’instruction supérieur à la moyenne ordinaire. S’associer, c’est se subordonner a une règle commune, ré primer les petites révoltes de l’amourpropre individuel ; bref, s’effacer un peu dans l’intérêt général. Nos marins ne manquent certes ni d’intelligence ni de bon sens, mais ils en sont encore à cette période rudimentaire où chacun se figure qu’en travaillant exclusivement pour lui, il obtient le maximum de bénéfices. Des hommes très éclairés et dévoués à tout ce qui concerne nos grandes indus tries nationales ont compris cet état d’es prit de nos marins, et viennent de prendre en main leur cause. M. Caclieux, membre du Conseil supé rieur de la marine marchande; M. Hous sin, commissaire général de la marine en retraite; M. Léon de Seilhac, délégué permanent du Musée social, sont des per sonnalités absolument compétentes en Sait de questions maritimes. Or, ils ont vu ceci : que les pécheurs sont isolés, que, sans liens entre eux, routiniers, pauvres, sans capitaux, préoccupés avant tout de gagner le pain de chaque jour, ces pécheurs se trouvent à la discrétion des « mareyeurs » ou acheteurs en gros. Réunis au Musée social, M. Cacheux et ses collègues ont alors jeté les bases de la combinaison suivante : Une société serait formée, à laquelle seraient conviés d’adhérer les marins ou patrons qui se livrent à la pèche côtière, et qui serait chargée de la vente de leur poisson. Celui-ci leur serait payé au prix net de la vente réalisée, moyennant une retenue qui leur laisserait encore un prix supérieur à celui qu’ils en retirent au jourd’hui. Cette retenue servirait d’abord à payer les frais généraux, à supporter le prélèvement de la réserve légale, puis celui de l’intérêt du capital social. Le reste serait affecté à la formation d’un fonds de prévoyance pour des œuvres diverses à l’usage des pêcheurs, et, enfin, sauf une petite part donnée en gratifica tions au personnel salarié, réparti entre les associés au prorata de leurs livrai sons de pêche. Rien de plus sensé et de plus pratique que ce projet. La seule arme dont puis sent disposer les pêcheurs contre ceux qui les exploitent, c’est évidemment l’as sociation. Vendant eux-mêmes leur pêche, ils en retireront un large bénéfice, et il ne leur arrivera pas ce qui leur est arrivé il...
À propos
Lancée en 1862, La France était un quotidien suivant une ligne éditoriale à la fois libérale et favorable au Second Empire. Durant la Commune de Paris, le quotidien publia également une édition départementale imprimée à Tours. En 1874, Émile de Girardin, fondateur de La Presse et grand entrepreneur médiatique également proche d’Adolphe Thiers et de Gambetta, rachète le journal. Sur quatre pages, on y écrit de longs articles, en plusieurs parties, qui s’étendent parfois même sur plusieurs jours.
En savoir plus Données de classification - j.-b. gobert-martin
- musset
- cacheux
- michaux
- henner
- cornélius herz
- g. fou
- georges picot
- kunc
- crocé-spinelli
- paris
- réaumur
- londres
- amiens
- pékin
- france
- madrid
- ouessant
- gannat
- gassin
- musée social
- la république
- conseil de cabinet
- union postale
- sri
- m. l
- tci
- chemin de fer du nord
- arc en ciel
- chartered