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La France, 4 octobre 1897

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La France
4 octobre 1897


Extrait du journal

Une fois lancé, mon homme ne tarissait point. On eût dit qu’il s’interviewait laimême : — Parmi les auditeurs de ces cours, les uns sont des gamins et des gamines, les autres des jeunes filles et des hommes faits. Têtes , blondes et tètes grises. Mé lange bizarre, mais non sans utilité. La tète grise dit à la tète blonde : « On veut me remplacer par un Anglais ou par un Allemand. Je viens apprendre les langues vivantes et je défends ma position. Fais comme moi, jeune homme, mais fais-le à l'heure opportune 1 » — Ils sont donc très forts, vos cours commerciaux ? — Il y en a de forts, il y en a de faibles. Cela dépend du choix des professeurs et beaucoup de l’ancienneté du cours. Ceux qui s’habituent n suivre régulièrement avancent avec une facilité prodigieuse. Les intermittents ne font pas grand’chose. Les auditeurs exacts étonnent par leurs pro grès... Laissez-moi vous raconter une anecdote typique... Un jour, un inspecteur entra à l’improviste dans un cours et dicte un probe!me assez compliqué... Il donne une demi-heure pour le résoudre. — C'est fait ! répondirent trois ou quatre voix. — Et c’était fait. L’inspecteur un peu surprit, re garde ces improvisateurs, les dévisage et se met à rire. — Ce n’est pas du jeu, s’éeriet il, vous êtes Israélites 1 — C’étaient, en effet, des jeunes filles Israélites qui, ayant, par vertu de race, le génie du calcul, en veulent avoir la science. Naturellement, elles font monter le niveau du cours.. — Bon pour le calcul... Mais les langues vivantes? — C'est autre chose. Tout le monde en veut, et, petit à petit, on voit surgir une génération tout entière qui, remplace, non sans avantage, la légion des commis exoti ques, presque tous Allemands sous divers marques, dont Paris est infesté. Mais quel travail inaccoutumé pour des Parisiens et surtout pour des Parisiennes 1 Eh bien ! ici encore, c'est fait ! Ah ! si vous assistiez aux examens, vous verriez qu'on ne les écrase pas de questions grammaticales. Ils lisent un texte, font prendre de bonne pro nonciation, rédigent en langue étrangère... et c’est tout... Quant aux mystères de l'im parfait du subjonctif, ils s’en moquent comme d’une guigne ! —A voua écouter,on croirait que ces cours sont l'idéal du genre. — Hélas, non ! les cours, étant sérieux, ne ressemblent pas aux conférences bril lants, encore moins aux cours à réclamer... Et c'est là leur défaut... Ils manquent de publicité. On ne sait pas assez que les jeu nes gens qui, par cet emploi austère de leur soirée, s’assimilent une instruction spé ciale, et qui, employés le matin, étudiants le soir, unissant ainsi la pratique à l’élude, acquièrent un véritable capital et doub’ent les chances de leurs carrières... La Ville colle des affiches...On en colle d’autres par dessus... Et voilà comment la masse ignore qu’il y a tant de foyers intellectuels ouverts dans Paris... Ah ! si la Presse voulait le crier bien fort, elle ne ferait pas seulement une couvre utile, mais une œuvre patrioti que... C'est fait. Emile Elavet....

À propos

Lancée en 1862, La France était un quotidien suivant une ligne éditoriale à la fois libérale et favorable au Second Empire. Durant la Commune de Paris, le quotidien publia également une édition départementale imprimée à Tours. En 1874, Émile de Girardin, fondateur de La Presse et grand entrepreneur médiatique également proche d’Adolphe Thiers et de Gambetta, rachète le journal. Sur quatre pages, on y écrit de longs articles, en plusieurs parties, qui s’étendent parfois même sur plusieurs jours.

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