Extrait du journal
Nous nous intéressons bien plus — 4îela du moins était vrai avant la guerre — aux fantaisies d’un cabotin qu’aux réformes ou aux projets d’un ministre intelligent. L’étude des conditions de /la prospérité nationale nous donnait mal à la tête. Pourtant, quelle œuvre d’hu manité ou même d’art plus belle que «elle d’augmenter ou de perfectionner, tdans un pays civilisé comme la France, les ressources matérielles qui font la vie plus douce et peut-être plus facile l’élévation morale de l’homme ? Si nous souffrons aujourd’hui de la trop fameuse crise des transports, c’est beaucoup par notre faute. Des moyens de transport qu’011 croyait secondaires, sont devenus essentiels. Les voies d’eau tracées par Riquct ou Sully, jouent un grand Aôle à cette heure. Aux heures de la paix, on les avait négligées. Certes, la voie ferrée a fourni un ren dement excellent. La guerre avait res treint son personnel, réduit le nombre des wagons et des locomotives, lesquels, en outre, soumis à un service intensif, ne peuvent être que difficilement répa rés. Comment lui demander davantage? Sa compagne, la voie d’eau, aurait dû l’aider, surtout pour les transports lourds, charbon, minerais, céréales. Au Havre et à Rouen, on a pu partager le trafic grâce à la Seine, qui semble ne se livrer parfois à un débordement que pour signaler sa sagesse ordinaire. Mais ce double trafic, on n’a pu le réaliser ni à Nantes, qui est privée de relations par eau avec Paris et le centre de la France, ni à La Pallice, ni à Marseille, ni à Bordeaux, qui ne dispose que d’un canal à peu près inutile, celui latéral à la Garonne. * * Savez-vous que le plan de mobilisa tion n’avait pas prévu le fonctionne ment des voies d’eau en cas de guerre? Si les canaux et les fleuves du Nord et du Nord-Est sont organisés d’une façon convenable, il n’en est pas de même dans le reste du pays. Pourtant, les - voies d’eau ne manquent nulle part. i Le groupe, dont Nantes devrait être la capitale, comprend le canal qui va jusqu’à Brest, la Vilaine, la Loire, la Mayenne, le Loir. Admirable réseauSeulement, il n’est pas homogène ; la péniche flamande ne peut y accéder ; enfin, la Loire n’est pas navigable. Dans le groupe des Charentes, Niort et Angoulême pourraient transporter par chalands, si l’on creusait le lit de leurs rivières. — Bordeaux pourrait être des servi merveilleusement par les affluents de la Garonne qui sont coupés d’écluses; mais ces affluents ne sont navigables ; qu’en théorie. Le canal latéral atteint Castets, à 53 kilomètres du port, non ipas Bordeaux ; il ne peut recevoir que des gabares de faible échantillon, à cause de l’insuffisance de ses écluses. Le canal du Midi n’est qu’un fossé rempli d’eau et qui ne sert à rien. On continue de l’entretenir de la même ma nière qu’il y a trente ans ; des éclusiers, pour tromper leur ennui, coupent sur les talus les herbes trop hautes qui gêneraient les pêcheurs à la ligne ; sur de certains parcours, les roseaux touf fus jouent de la flûte sous le souffle des vents. En 1847, lors de la construction du chemin de fer, quatre cents conseils municipaux de cette région amie du so leil ne demandèrent-ils pas que ce canal de Paul Riquet fût comblé, et que tout simplement sur ce nouveau chemin de terre 011 posât les rails de fer ? Le Nord et l’Est de la France, qui se relient à la Bourgogne et au Lyonnais, sont moins mal outillés. Mais la pente de leurs rivières entraîne nos marchan dises vers la Belgique ou Rotterdam, et leurs canaux, quand ils 11’aboutisscnt pas à la Seine, se raccordent avec le ré seau belge ou alsacien-Iorrain, et par là avec la Meuse et le Rhin. • * * * L’Allemagne a bien compris la très grande valeur de la voie d’eau. Malgré un prodigieux développement de voies ferrées, elle a sillonné de canaux son territoire. A la veille de la guerre, elle construisait l’énorme Mitteland-Canal, qui joindra le Rhin à l’Elbe. Pour celui qui du Rhin à Berne tra verse la région la plus riche, elle n’a pas hésité à démolir des rues entières, à couper des routes et des voies ferrées. En 1914, ce canal a transporté 640.000 tonnes ; en 1916, plus de 5 millions. Quand survient une crise, aussi péni ble que celle que nous subissons en France, la voie d’eau soulage, si on peut dire, la voie de fer. Une péniçhe de 300 tonnes vaut un train de trente wagons, et sur les fleuves les chalands peuvent contenir mille tonnes. L’un des premiers avantages du canal est d’abaisser le prix du transport et de supprimer l'intermédiaire. Tout récemment, j’ai montré le grand port de Strasbourg, ses bassins indus triels, ses bassins de commerce. Bâle, qui reçoit également les chalands du Rhin, contribue à augmenter les rela tions de la Suisse avec l’Allemagne et Rotterdam. Les Suisses sont d’ailleurs...
À propos
Lancée en 1862, La France était un quotidien suivant une ligne éditoriale à la fois libérale et favorable au Second Empire. Durant la Commune de Paris, le quotidien publia également une édition départementale imprimée à Tours. En 1874, Émile de Girardin, fondateur de La Presse et grand entrepreneur médiatique également proche d’Adolphe Thiers et de Gambetta, rachète le journal. Sur quatre pages, on y écrit de longs articles, en plusieurs parties, qui s’étendent parfois même sur plusieurs jours.
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