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La France, 12 novembre 1888

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La France
12 novembre 1888


Extrait du journal

droit de donner leur avis sans avoir passé par le Borda Ce ' sont des marins qui ont été les premiers à porter le débat devant le public. Tous les amiraux sont également compétents, mais quand ces autorités égales sont en désaccord, il est permis au Parlement d’examiner les pièces du procès, et à la presse de faire valoir les arguments qu’on apporte de part et d’autre. Il serait commode d’admettre en principe l’infaillibilité des ministres ; mais alors on devrait supposer que l’a miral Aube a été infaillible à son heure, que l’amiral Krantz l’est aujourd’hui, que l’amiral X ou Y le sera demain. Or il est absolument impossible de conci lier toutes les opinions de ces person nages qui se sont bien un peu contredits les uns les autres. Sur le champ de bataille les hommes du métier ont seuls la parole ; seuls ils savent faire la guerre ; savent-ils seuls la préparer? On ne le soutient pas pour la guerre sur terre, puisque M. de Frey cinet n’a jamais appartenu à l’armée. Serait-ce plus vrai sur mer? On est géné ralement d’accord pour ranger parmi nos meilleurs ministres de la marine Ducos et Chasseloup-Laubat, des civils. Notre marine a été créée par Richelieu et par Colbert, qui n’étaient pas des hommes d’épée, ni des navigateurs émérites. 11 y a dans la préparation de la guerre navale un côté financier, administratif, industriel, qui a bien son importance. Un excellent officier peut n’ètre ni cons tructeur, ni mécanicien, ni comptai de, peut se tromper sur des questions de cet ordre et profiter des avis que les civils lui donnent dans une discussion publique. Comme l’armement est sans cesse en voie de transformation, et qu’il y a beau coup de chances pour que la guerre se fasse demain tout autrement qu’hier, l’expérience personnelle ne suffit pas et le raisonnement a son rôle à jouer. Or, s’il appartient aux hommes spéciaux de rassembler les données du problème, tout ce qui est raisonnement tombe sous la compétence du Parlement, de la presse et du public. Enfin nous ne sommes pas seuls au monde. D’autres nations font d’éner giques efforts pour nous rejoindre et nous dépasser. Si nos marins nous dé claraient que les Allemands et les Ita liens n’y entendent rien et qu’il n’y a pas à tenir compte de leur exemple, nous serions en droit de rappeler que cette confiance arrogante et aveugle nous a été fatale et que les Français n’ont pas le privilège de ne jamais se tromper. Voilà bien des raisons pour que la Chambre n’abandonne pas son droit, ne déserte pas son devoir de contrôle dans les questions maritimes, pour que le pu blic suive avec attention des débats où la sécurité même de la patrie est en jeu. Raoul Frary. — ♦ L UNION LATINE...

À propos

Lancée en 1862, La France était un quotidien suivant une ligne éditoriale à la fois libérale et favorable au Second Empire. Durant la Commune de Paris, le quotidien publia également une édition départementale imprimée à Tours. En 1874, Émile de Girardin, fondateur de La Presse et grand entrepreneur médiatique également proche d’Adolphe Thiers et de Gambetta, rachète le journal. Sur quatre pages, on y écrit de longs articles, en plusieurs parties, qui s’étendent parfois même sur plusieurs jours.

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