Extrait du journal

de la tour Eiffel, etlareproduction d’un* barque danoise qui, sous le commande ment de Witkind Lerf Likson aurait, cinq cents ans avant Christophe Co lomb, abordé au nouveau continent. Un mot de critique en passant à une affreuse tour-réclame qui, de quelque point qu'on regarde, vient déflorer la perspective des jardins, et nous voici où j’avais hâte de vous conduire, à l'in contestable clou de l’Exposition d’An vers, c’est-à-dire devant la poterne qui va nous donner accès dans le vieil An vers des XV* et XVI* siècles, restitué avec un goût, une précision, une exac titude qui laissent loin derrière eux tout ce qui a été jusqu’ici tenté dans le genre. A vrai dire, avant de l’avoir vu, me méfiais un peu de ce numéro sur le quel m’avait blasé la restitution delà Bastille en 1889. C’est que je ne savais pas quelle patience, quel dévouement, quel amour du vieux sol natal les Anversois pouvaient apporter à un travail de ce genre. Je l’ai vu inachevé et j’en suis ébloui. Qu’on se figure un vaste quadrilatère formé par quatre rues se croisant et ces quatre rues bordées de chaque côté par des maisons de style gothique ou du renaissance le plus pur, construites dans leurs proportions exactes et dans lesquelles la vie de tous les jours s’exerce dans un anachronisme fidèlement resti tué. C'est ce que sera le vieil Anvers après l'inauguration. Je cite, pour mémoire, semés par-cr par-là, les monuments historiques re constitués d’après les documents les plus sûrs, tels que le vieil Hôtel de Ville édi fié en 1410, démoli en 1505, la chapelle gothique pour laquelle le musée d'An vers a prêté son Christ de marbre uni versellement célèbre, la Halle aux draps, la Bourse, non celle qui fut détruite par un incendie, mais la première, édifiée en 1531. Tout cela, c’est le décor extérieur, ïe cadre très pittoresque avec ses puits de fer forgé, ses guinguettes et ses jardins joyeux, ses enseignes commerciales du vieux temps, et si exacte que soit la re production, si scrupuleuses qu’aient été les recherches archéologiques qui y ont conduit, on peut dire que c’est eu somme la partie facile de la restitution. Mais la pièce qui se jouera dans ce dé cor, et qu’on ne saurait concevoir si l’on ne tenait compte du côté placide, froid et tenace du caractère flamand, ce sera la vie même de l’époque disparue. Je n'en ai vu qu'une incomplète répé tition ; mais, à en juger par le sérieux, par l’ardeur des acteurs et des figurants volontaires, cela sera, à n'en pas douter, surprenant. ,-/' Qu’on songe que dans toutes ces maVsons habitées par des comparses qui y exerceront, dans les conditions de l'épo que, les industries de l’époque, que dans les jardins remplis de rires et de cris sauteront ou boiront des flamands et des flamandes du quinzième siècle, que sur la vaste place centrale où un théâtre volant s’élèvera, se joueront des mys tères du temps, que des lavandières la veront, que des cordonniers feront do la chaussure, des tisserands des étoffes, que des drapiers du temps vendront du drap du temps et que des charcutiers non moins du temps débiteront du co chon qui je l'espère sera, lui, moderne. Qu’on se figure qu'à certains jours la reconstitution d’une fête sera donnée par tous ces figurants volontaires, si tiers de leurs rôles et vivant si bien leurs personnages que d ores et déjà ils ne se croient plus Belges et qu'ils so figurent être des citoyens libres de l’An vers d’autrefois, et franchement, ne croit-on pas comme moi qu’avec tous ces éléments les organisateurs vont nous donner pendant quelques instants l’évocation d'un âge disparu. L'inaugurationdc cette partie de l’Ex position, si son programme s'accomplit...