Extrait du journal

La princesse Mirette était très petite ; oh! une toute petite fille vraiment — point quinze ans encore. Elle avait un mince visage délicat. Ses joues étaient comme deux pétales de fleur blanche et sous ses cheveux sombres, coupés droits, frange lisse et lourdo sur son front étroit, ses yeux semblaient deux violettes lasses, tristes et ravissantes : yeux de rêve et d'angoisse. Elle parlait peu, et, sur le silence de son âme, ses lèvres sinueuses, — ligne à peine rose, — se serraient obstinément farouches, hautaines, méprisantes. Tout son corps frêle disparaissait, s'hiératisait en un long fourreau d'étoffes précieuses brodées d'or, tramées d'argent et où un dessin fulgurant de pierreries traçait des vols d'oiseaux, allumait des feux constellés d'étoiles. Aussi, le souffle de sa petite gorge d'enfant n'était point sensible sous le gorge ri n tissé de perles et alourdi de turquoises royales ; ses mains et ses pieds s'immobilisaient sous le poids des gemmes qui les chargeaient, et la princesse Mirette semblait vraiment déjà une morte, une belle petite morte à la chair pesante, glacée, décolorée, mais une morte qui eût gardé un hallucinant regard, un regard d'outretombe, un très effroyable et invincible regard... Et ainsi, sous cette apparence somptueuse et inanimée elle parlait, la petite fille, et disait très bas :...