Extrait du journal

Ce lut hier à Biarritz le premier dimanche « mouillé ». ~ t • Les Biarrots en général n’aiment pas la pluie. Ce en quoi je trouve qu’ils ont raison. Mais s'ils 11 aiment pas la pluie — même sur semaine — il faut reconnaitrc que la pluie, le dimanche, les rend fous. Et le l’ait est qu’un dimanche sous l’eau est quelque chose de simplement affreux. Je vous dirai même qu’à mon avis, il ne devrait jamais en somme pleuvoir le sep tième jour de la semaine — qui est le jour du bon Dieu. Mais que ce'fut pour cette raison-là ou bien parce que la jolie exposition florale les attirait véritablement, toujours est-il que les Biarrots étaient venus nombreux hier dans les salons du Casino Bellevue. Et quel charme en effet pour les yeux que cette superbe ordonnance de chrysan thèmes où toutes les variétés, toutes .les di mensions, toutes les nuances se mariaient harmonieusement sotts la lumière dorée des lustres dont les hautes glaces des panneaux se renvoyaient l’éclat 1 Dans un coin du second salon, un amour de petite fille, haute comme la moitié d’un parapluie, avec dans les cheveux un noeud rose volumineux et sous son bras un petit chien en baudruche regardait les fleurs de ses deux grands yeux bleus de poupée. — N'est-ce pas qu’elles sont jolies ces fleurs, bébé ? Mais l’enfant, qui n’est pas nce timide, nous fixe et tout aussitôt : — Oui, mais ça coûte cher ? — Pourquoi 111e demandez-vous cela ? ??? — Vous voudriez sans doute qu’elles soient à vous ? — Oui. ' 1 » i — Et qu’en feriez-vous ? D'abord l’enfant hésite, puis levant à nou veau sur nous ses beaux yeux profonds et d’une voix basse î — Je les donnerais à ma maman. Ainsi donc le mauvais temps qui avait débuté, dimanche matin, par un violent orage, s'est poursuivi tout le jour avec des liants et des bas, des alternances de soleil et d’eau. Vers le soir, ainsi que d’ailleurs cela se produit fréquemment, les choses empirè rent au point que nous connûmes dans la nuit une vraie petite tempête fort capable d’avoir tenu éveillés bien des gens. Mais qu'importe ! * Les Biarrots sont si profondément atta' chés à leur ville qu’ils se sentent la force de J aimer — tel une jeune mari sa femme — jusque dans ses défauts. Trente ans. Cheveux châtains, fournis, partagés en deux parties égales tpar une raie et traver sés dans leur longueur par trois fils d’ar gent. Des yeux bleus largement, ouverts et francs, mais abrités derrière un binocle, la moustache taillée à l'américaine, le visage oval et rosé à la fois énergique et doux. Porte le plus généralement des complets très clairs et dont le veston est boutonné par le milieu. Occupant à Biarritz une situation de pre mier plan et fort absorbé, il passe sa jour née à recevoir des visites et à donner des ordres. Descend cependant tous les soirs, vers six heures, sur la jetée-promenade, nuetête, mais par contre toujours ganté et ses gants toujours rabattus sur les doigts. Détail particulier : siffle comme un merle. JEAN QUI PLEIHB....