Extrait du journal

Il la savait là, à deux pas de lui, détachée de tout, délivrée de l'amour de Frédéric de Bernay, dont le bonheur qu'il avait vu et touché du doigt, pour ainsi dire, pendant une année d'intimité, avait achevé de l'affoler et de faire germer dans son âme, les projets sinistres qu'il avait mis à exécution. Elle était là, il est vrai, mais en larmes, désespérée, à l'état de Râchel, pleurant ses enfants et ne voulant pas être consolée. Oserait-il jamais lui parler d'amour, et elle, songerait-elle jamais à lui répondre ? N'avait-il pas brisé son cœur en pure perte ; introduit pour rien dans cette maison, hier encore si gaie, le deuil et la mort, fait inutilement de sa vie à lui, qui aurait pu être glorieuse heureuse peut-être, un tourment et une honte ?. Toutes ces idées passaient en lui, dans ce calme profond qui l'enveloppait. C'est à peine s'il comprenait ce qu'il lisait. C'était la première heure qu'il restait seul depuis la découverte du crime, la première fois qu'il pouvait, loin de tout témoin, coordonner les pensées qui lui venaient....