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La Lanterne, 5 juin 1901

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La Lanterne
5 juin 1901


Extrait du journal

Bxpiation, la plus légère parole a son écho. Aimer, c'est posséder un inestimable trésor dont la moindre négligence peut amener la perte. Toutes les ressources de l'esprit le plus délié, les mille ingéniosités du cœur, les observations les plus minutieuses, les calculs d'une prévoyance toujours en éveil, les stratagèmes les plus habiles, pourvu qu'ils soient dissimulés sous les apparences du naturel, ne sont pas de trop pour conserver une passion dans sa fleur première et délicieuse. C'est, à la fois, la tâche la plus lourde et la plus charmante de la vie, celle dont nous ne devons jamais nous lasser, fût-ce une, heure, pour peu que nous tenions à notre félicité ; L'effort est constant, parfois difficile à soutenir; comment, dès lors, s'étonner que tant d'imprudents époux flétrissent et souillent leur tendresse, l'amoindrissent par leurs négligences répétées, par leur abandon progressif de la coquetterie nécessaire et sacrée, par leur soumission trop faciles aux laideurs de l'existence ? Après quelques années de mariage, une jeune femme sedemandedouloureusementpourquoi sa beauté n'est plus aussi fêtée que par le passé, pourquoi sa grâce passe maintenant presque inaperçue. Sans réfléchir, elle impute, bien entendu, ce triste changement à l'inconstance naturelle des hommes. Mais, pauvre étourdie, prends un miroir et regarde-toi ! Est-ce que, au temps de tes fiançailles,tu étais ainsi coiffée,sans art et sans recherche? Est-ce que ta robe était aussi fripée, ta ceinture aussi lâche? Est-ce que tes petites mains, qu'il trouvait si jolies, n'étaient pas plus blanches et plus parfumées ? Ce n'est pas lui qui a changé, c'est toi ; toi qui t'endors dans un coupable repos, protégée par les lois et par les serments, tu pourrais en toute sécurité jouer le rôle divin de la maîtresse ; mais tu le dédaignes, tu ie laisses à une autre,peut-être ! Et tu te plains, et tu accuses ? Quelle folie ! N'accuse que toi-même, ignorante ; gardienne infidèle, tu as mal veillé sur ton bien, tu l'as laissé s'altérer et se perdre, tu n'as pas vraiment su aimer....

À propos

Le quotidien La Lanterne fut lancé le 21 avril 1877 à Paris par Eugène Mayer – alors coulissier à la Bourse – avec le soutien actif des radicaux de Lyon. Il connut d’abord un important succès grâce à une ample campagne de presse et à son soutien véhément du boulangisme. Titre phare de la presse radicale, le journal voit son influence s’affaiblir considérablement durant l’entre-deux-guerres avant de disparaitre définitivement en décembre 1928.

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