Extrait du journal

Et les dogmes, par définition, ne tolèrent 'pas l'examen. Et puis, le sentiment patriotique est devenu tellement fier, tellement vif, tellement absolu et tellement ombragux, qu'il ne supporte plus la contradiction ni le schisme. Y toucher, mêjne d'une main légère, c'est commettre un sacrilège. Il n'est pourtant pas bien vieux. Il a fleuri sur les champs de bataille de la Révolution. Car, auparavant, on se battait chez nous pour le roi, et non pas pour la France. Mais il a bien rattrapé le temps perdu. Des siècles furent nécessaires au christianisme pour courber les foules en des attitudes de fespect, pour les amener à se découvrir dans ses temples et devant les emblèmes de son culte. Il en fallut bien moins au patriotisme pour imposer unanimement des gestes analogues de piété. Il semble bien même qu'une religion chasse l'autre. Aujourd'hui, dans un salon, il serait infiniment plus scabreux d'avouer son incroyance patriotique que d'avouer son incroyance divine. Enfin, le plus timide hérétique s'expose à ce qu'on le soupçonne de pactiser avec l'ennemi. C'est un argument qu'on a tôt fait de lui jeter dans l'estomac. Et l'accusation est irri-...