Extrait du journal

Le ministère de l'agriculture s’est enfin décidé à faire connaître la statistique d’intuition, que l’on appelle administrativement l’état approximatif de la récolte du froment, du détail et du seigle, c’est-à-dire des grains qui entrent plus spécialement dans la confection du pain, quoiqu’on y ajoute aussi normalement de l’orge, de la baillasse, des fèves, du mais et du sarrasin, et, dans les temps de cherté, du riz et des pommes de terre. D’après un calcul qui ne repose que sur des données dont la valeur varie suivant la qualité de ceux qui en ont fourni les éléments partiels, la récolte du froment serait réduite à 81,889,070 hectolitres, en diminution de 35 millions sur celle de 1890, — pesant 62,465,352 quintaux, soit 27 millions de quintaux en moins. Celle du détail serait de 3,636,992 hectolitres, pesant 2,668,826 quintaux, soit 1,300,000 hectolitres et 900,000 quintaux en moins. Enfin, la récolte du seigle aurait atteint 21,152,317 hectolitres ou 15,174,966 quintaux, d’où une différence en moins de 3 millions d’hectolitres ou de 1,800,000 quintaux. En somme, comptant en raison de la résorption de l’eau par la pâte, un kilogramme de pain pour un kilogramme de grain, nous aurions récolté 80,309,146 quintaux de substances normalement panifiasses, équivalant, pour 40,000,000 d’habitants, à 200 kilogrammes de bon pain par tête, soit une ration journalière de 550 grammes. On voit que, même en tenant compte de l'inexactitude de ces données, la famine n’est pas à craindre....