Extrait du journal

Le Sénat a été hier le théâtre d’un f’|iis'i'le dont le coté burlesque n'efface pas le caractère regrettable. On sait que, sous l’impression de la parole ardente de ctl. ChaHeniel-Lacour, M. Léon Sav, reprenant un usage parlementaire tombé en désuétude, avait demandé l’impression et l’aff. liage du discours de ce sénateur. Un grand nombre d’abstentions s’étant produit *s au moment du scrutin, par suite de l’incertitude qui régnait sur la portée île cette manifestation, le quorum n’avait pu être atteint, et le vote avait été remis m commencement de la séance suivante. La Gauche républicaine ayant refusé de 5*associer à cet acte d’hostilité, pour ne pas causer un crève-cœur à M. r loquet, — très mal mené dans cette fougueuse harangue, — et aussi pour ne pas entraver des négociations ouvertes à l’effet de convertir ce fier radical à l’opportunisme repentant, M. Léon Say a retiré sa proposition. Mais M. Naquet l’a reprise et a prononcé à cette occasion quelques paroles conformes aux théories houlaugistcs, qui ont paru outrageantes au Sénat. Alors, après le rejet de la proposition à l'unanimité moins trois voix, M. Naquet ayant voulu reproduire ses invectives, a été viné, sifflé, injurié, littéralement mis à la porte, et salué à la sortie par ce cri parti :lo la Gauche : « Justice est faite. » Cette expuLsion sans précédent vise en plein I • boulangisme, — que nous combattons au nom du bon sens, — mais toutefois nous n’hésitons pas à la qualifier de scandaleuse. C’est un manquement au principe essentiel du régime parlementaire, lequel repose sur la libre discussion et le respect mutuel des opinions en antagonisme. Que n’eût-on pas dit, sous l'Kmpire, si M. de Mornv ou M. Schneider eussent laissé la majorité ardente du Corps législatif « faire justice des Cinq m? La Chambre, où la moyenne d’âge est moins élevée qu'au Sénat, a montré plus de calme parlementaire en laissant M. GiUy s’asseoir tranquillement à -'On liane, et pourtant M.Gilly avait des torts personnels vis-à-vis de plus de vingt de ses collègues! Après ce fâcheux incident, In rapporteur général du budget a rappelé l'Assemblée à la réalité des choses 1 n lui servant un prolixe cl substantiel com m maire des beautés de notre situation financière. Pour lui, tout est bien, quoique pouvant être mieux. Ce à quoi M. Placier, iu nom de la Droite, a répliqué que tout va >ie mal en pis, et il s’est chargé de le démontrer. Eu conséquence, et pour exiler toute responsabilité, M. lîlavicr est décidé à refuser le budget. La discussion continuera aujourd'hui....