Extrait du journal

Un paysan du Tyrol tua son fils afin de l’exempter du service militaire ; ce paysan était peut être un mauvais patriote, mais c’était un bon père : il ne pouvait pas s'accoutumer à l’idée que la chair de sa chair pourrait avoir à souffrir des rigueurs de la discipline. De nos jours, Deblander n'a-t-i) pas tué ses deux fillettes « pour les soustraire aux mauvais exemples », ainsi qu’il l’a déclaré ? 11 est évident que cet assassin est un père très moral. Oh! combien! Il s’est dit : Si je laisse mes enfants en vie, certainement elles auront de mauvais exemples sous les yeux; cette pensée l’a fait frémir ; il a couru les retirer de la crèche où leur mère les avait déposées, il les a étranglées et les a jetées du haut des fortifications dans le fossé. Quelle grandeur dame! Les nombreux crimes qui ornent journellement les colonnes des journaux ont des motifs semblables : des parents jettent leurs enfants à l'eau, d’autres les maltraitent, les laissent mourir de faim, les précipitent d’un cinquième sur le pavé ; le vulgaire ne voit là que des crimes. Erreur profonde! Ces parents sont des héros; s’ils mettent à mort ces pauvres et douces créa- i pures, c’est pour les empêcher de nia! tourner, pour les soustraire aux ennuis de la lutte pour la vie. C’est par excès de vertu ou par excès d'amour....