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La Petite Gironde, 9 octobre 1907

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La Petite Gironde
9 octobre 1907


Extrait du journal

plus vite que les violons, sous peine de perdre encore plus de temps qu’il n’est né cessaire et d’arriver à un résultat encore moins satisfaisant. Si l’on va. au fond des choses, c’est tou jours la même raison qui se retrouve. Pas d’argent ! Pardonnez-moi si je rabâche, mais réellement je ne puis me faire à cette mys tification. On vote des millions par tombe reaux pour créer des navires, et lorsque ces navires ont pris forme, vont sur l’eau, sont catalogués dans une escadre, dès qu ils sont sortis du chantier pour entrer dans la flotte, adieu le lastc et la prodigalité ! C’est la misère noire. I)e sorte que tout se passe comme si on voulait, je le répète, mystifier le pays, lui faire croire qu’il a une flotte tout en lui épargnant une partie des frais indispensables à sa mise en valeur. Hâtonsnous d’ajouter que l’administration de la marine est la première à se suggestionner l’illusion qu’elle tend à créer. Elle est de bonne foi, et c’est ce qu'il y a de plus ter rible. Je ne m’enthousiasme donc pas outre me sure à l’idée que nous allons tirer des plans pour une classe future et hypothéquer un avenir qui e?t déjà formidablement obéré d’une pièce d’un demi-milliard « de mieux ». Mais quoi 1 l’Europe entière nous pousse. La presse internationale nous houspille pour nous être laissés tomber au quatrième rang de la puissance navale. A ces accents d'outre-mer et d’outre-Rhm s’éveillent en nous les résolutions que n’ont pu détermi ner les constatations parfaitement claires et cruellement précises que nous pouvons faire depuis cinq ans. Il y a cinq ans, nous disions, chiffres en main et avec une ri gueur mathématique ; dans cinq ans, notre marine occupera le quatrième rang. Per sonne ne s’en alarmait. Aujourd’hui, 'es étrangers nous disent : vous y êtes I Alors, tout change. Nous nous ramassons pour prendre notre élani II fallait partir plus tôt. A l’heure actuelle, rien ne servirait de courir. La première nécessité est d'opérer avec méthode. Le programme de 1906 a été ins titué et voté dans des conditions déplora bles. On demandent à un Conseil supérieur nouvellement formé, et qui n’avait aucune idée, de formuler le corps d’une doctrine à laquelle il n’avait jamais pensé, de pren dre une décision de principe à laquelle il n’était point préparé, et cela dans un temps très court. La presse lui fut d’un grand se cours ; il épousa ce qu’il crut être l’opinion la plus généralement admise, et fournit la solution inadmissible de bateaux sans vi tesse et d’armement hétéroclite, qu’il re dressa aussitôt, devant l’irritation de la mê me opinion, en supprimant les munitions pour améliorer la vitesse, puis en admet tant les turbines, ce qui permit en fin de compte un gain de poids disponible pour l’approvisionnement de l’artillerie, qui.res te fort restreint. C’est ce compromis que vont réaliser les Danton. Le Parlement ne l’aurait vraisemblablement pas accepté s’il avait eu le loisir d'étudier et de discuter le programme. Mais le temps pressait. Il fallait adopter le projet ou perdre un an et compromettre le programme lui-même. C’est fait ! A la sourde et par petits coups, on améliore, on modifie, on modernise le plan primitif. Comme c’est défendu, on s’en cache, et comme c’était nécessaire, il vaut mieux que nous fassions semblant de ne pas le savoir. Ce n’est qu’en 1910 à moins que ce ne soit un peu plus tard que les Danton apparaîtront aux yeux du vulgaire avec leurs qualités et leurs dé fauts. F.t jusque-là, il est difficile d’avoir une opinion. Voyez ce qui est arrivé pour les Patrie, sur lesquels la protection de l’artillerie était, disait-on, parfaite. C’est un peu du même ordre que ce qui était ar rivé quelques années auparavant pour les casemates aériennes du type Saint-Louis. Le bon public, en apercevant ces énormes champignons cuirassés que sont les tourel les, s’est baissé pour regarder l’épaisseur du dessous ; il n’a vu qu’un petit blindage de rien du tout, et il s’est écrié : Eh oui I elles sont invulnérables en haut et par cô té, mais si un obus éclate dessous, elles sauteront I On n'avait pas songé à cc léger détail. Le vulgaire, le public, les, incompétents...

À propos

Au début simple déclinaison à prix modique du journal La Gironde, La Petite Gironde devient de plus en plus autonome à la fin des années 1880, lorsque sa diffusion dépasse – et de très loin – celle de son vaisseau-mère pour atteindre les 200 000 exemplaires à l'orée de 1914. Centriste modérée à l'origine, sa ligne éditorialse se droitise au fil des ans, jusqu'à devenir proche de celle de L'Action française dans l'agitation de la Première Guerre mondiale. Sans surprise, le journal sera collaborationniste en 1940, puis interdit en août 1944.

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