Extrait du journal

ont fait tomber le portefeuille du commerce entre les.mains d'un protectionniste déclaré, M. Pierre Legrand, député du Nord. Quand M. Pierre Legrand a été nommé, on pouvait espérer qu’il tiendrait compte des circonstances particulières qui l'ont amené au pouvoir, qu'il garderait la neutralité entre les deux systèmes économiques qui se disputent la France et qu’il ne profiterait pas de sa situation pour livrer son administration aux influences protection nistes. On s’était trompé. 11 existait, à côté du ministre du commerce, une Assemblée de contrôle qu’on appelait le Conseil su périeur, qui comprenait trois sections, celles du commerce, de l'agriculture et de l’industrie et qui avait pour mission de donner son avis sur toutes les questions intéressant ces trois sources de la richesse publique, entre autres sur les traités de commerce, les tarifs de douanes, les conventions de navigation, les colonies, etc. Ce Conseil, jusqu’ici, avait fait preuve de compétence,d’autorité et d’impartialité; il modérait à la fois les libres échangistes trop fou gueux et les protectionnistes trop arriérés. Mais, chose étrange, contraire et à la logique et à tous les principes démocratiques, la composition de ce corps de contrôle et de consultation était à la discrétion du ministre qu’il devait contrôler. M. Pierre Legrand a profité de cette situation anormale pour remanier le Conseil, et, l’autre jour, au moment où personne ne s’y attendait, un décret a paru qui donnait nais sance à un nouveau Conseil su périeur, où l’élément protectionniste est en forte majorité et où l'on a fait la part congrue aux partisans du libre échange. Ce décret a produit une vive et légitime émotion dont nous nous faisons avec empressement l'écho. Il n’est pas admissible que le ministère et le Conseil supérieur du commerce soient l’un et l’autre inféo dés au protectionnisme ; il n'est pas admissible que le Conseil supérieur, dont la mission est de repré senter les intérêts généraux et non ceux d’une frac tion de l'industrie française,ait une majorité de parti pris hostile à la liberté des échanges et au dévelop pement des relations internationales: il n’est pas ad missible, enfin, que l’action gouvernementale et ad ministrative ne s’exerce plus que dans un sens exclu sif, pour le plus grand profit des manufacturiers et des lilaleurs, pour le plus grand mal des viticulteurs, de nombre de fabricants et de tous les consomma teurs. Le nouveau Conseil ne s’étant pas encore réuni, il est encore temps de réparer ce que nous voulons bien appeler « l’erreur » de M. Pierre Legrand. Nous comptons pour cela sur l'activité et le dévouement de nos élus....