Extrait du journal

Il faut qu’elle parte, on l’attend à Tou louse, où elle lèvera la jambe, et lancera des couplets d’une incohérence poivrée. Pierre donne rageusement du poing sur la table. — Dire que tu es là, et que je ne te vois pas 1 Est-ce que tu as toujours ta marque ? C’est une ancienne blessure qu’il se sou vient de lui avoir faite, quand ils jouaient, enfants, dans les champs.'Sans répondre, elle lui prend la main, qu’elle porte à son front, et il touche la cicatrice. Il s’attarde au grain de la peau; et sou dain, les doigts se promènent par le visage. Ils explorent les sourcils, les paupières, la courbe du nez, les joues, le menton, et les lèvres. Lentement, minutieusement, ils re connaissent les traits amis. C’est un con tact délicat, une caresse pure, une minute poignante et douce. La chanteuse se raidit : voici que les doigts remontent vers les yeux, et elle ne veut pas que son ami sente des larmes... Quelqu’un entre • le garçon. Il annonce, cfune voix endormie, la fermeture de l’éta blissement. Et derrière lui est apparu, dis crètement, le militaire de tout à l’heure, qui vient chercher l’aveugle. — On ne se sera pas retrouvé pour long temps! constate Pierre avec mélancolie. — Donne ton adresse, je t’écrirai ; si, je te le promets....