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La Petite Gironde, 21 novembre 1891

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La Petite Gironde
21 novembre 1891


Extrait du journal

La commission du budget se livre chaque année à une besogne qui rap pelle singulièrement le travail fameux de Pénélope. On sait que la femme d’Ulysse passait scs nuits à effiler la toile qu’elle avait tissée pendant le jour. Ce n’est pas, k vrai dire, la commission du budget qui s’amuse à défaire ce qu’elle a fait: mais d’autres s’en char gent, et le résultat final est le même. Pendant les deux ou trois mois qu’elle consacre à la préparation du budget, la commission s’exténue à faire des écono mies. Elle fouille tous les chapitres; elle épluche tous les articles ; elle grappille sur tous les alinéas pour réaliser des réductions de crédit. Elle arrive ainsi devant la Chambre avec un budget al légé d’un nombre raisonnable de mil lions. La discussion générale s’ouvre ; les orateurs de tous les partis montent k la tribune. Tous sont d’accord pour tresser à la commission des couronnes de fleurs... mêlées de quelques épines. On reconnaît qu’elle a fait de bonne be sogne; mais,enfin, elle aurait pu encore mieux faire. Ne pouvait-elle pas diminuer la part de tel ou tel ministère? rogner sur tel ou tel chapitre? réduire tel ou tel article? Tous les orateurs sont enflam més d’un beau zèle pour l’intérêt des contribuables. Si on les écoutait, le budget se réduirait presque à rien: on arriverait k pourvoir aux multiples dé penses des services publics sans qu’il en coûtât un sou aux citoyens. Mais, une fois close la discussion gé nérale, on se croit quitte envers la déesse Economie par l’hommage ver beux et platonique qu’on lui a rendu tout d’abord. Les différents chapitres du budget défilent sous les yeux de la Chambre, ministère par ministère. Sans doute, on va les pressurer encore pour en faire jaillir les réductions de crédits. Cb8xa-jêtre e**fmné près pour voir s’il n’est pas susceptible de rendre encore deuüC ou trois millions ou tout au moins deux ou trois centaines de mille francs. Que vous êtes loin de compte l 11 ne s’agit plus maintenant d’économies. Chaque orateur qui monte k la tribune y vient demander le relève ment de tel ou tel crédit qu’il trouve in suffisant. Les bonnes raisons ne lui manquent pas pour appuyer son dire : elles ne font jamais défaut en pareil cas. Les honorables sont tous plus ou moins de l’école de-ce commerçant qui, perdant sur chaque article vendu, se rattrapait sur l’ensemble. Ils prétendent diminuer le budget en gros et travaillent de leur mieux k l’augmenter en détail. Et comme la Chambre est bonne per sonne, comme il n’est guère de député qui n’ait quelque chose k demander en faveur de ses électeurs, il se trouve tou jours une majorité pour voter ces relè vements de crédits qui, pris individuelle ment, n’ont rien d’effrayant, mais qui, réunis en bloc, finissent par faire un total formidable. Le rapporteur général et les rappor teurs des budgets spéciaux ont beau protester, gémir, lever les bras au ciel, proclamer qu’on rend leur tâche impos sible : rien n’y fait. Leurs objurgations sont vaines ; leurs cris de désespoir ne...

À propos

Au début simple déclinaison à prix modique du journal La Gironde, La Petite Gironde devient de plus en plus autonome à la fin des années 1880, lorsque sa diffusion dépasse – et de très loin – celle de son vaisseau-mère pour atteindre les 200 000 exemplaires à l'orée de 1914. Centriste modérée à l'origine, sa ligne éditorialse se droitise au fil des ans, jusqu'à devenir proche de celle de L'Action française dans l'agitation de la Première Guerre mondiale. Sans surprise, le journal sera collaborationniste en 1940, puis interdit en août 1944.

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