Extrait du journal

Paris, 26 février. Fit comme on ne peut pas se tenir éter nellement à l'état d'indignation aigue, on commence à se détendre un peu les nerfs. On n’aperçoit plus, dans la rue, des visa ges convulsés par des passions contraires. L.es blêmes camelots montrent vainement au passant les gros titres faussement sen sationnels des journaux à scandale. Des scandales, le public ne veut plus en entendre parler, — pour le moment. 11 est arrivé à saturation parfaite. Les étudiants ont entrepris de ranimer la gaîté publique en organisant une caval cade de la Mi-Carémc, ce qui vaut mieux que de conspuer à tort et à travers. Les Lavoirs et les Marches étaient, en vertu d une vieille tradition, les organisa teurs de cette fete ; mais la discorde a tout gâté. Les deux puissances jalouses se querellent et se combattent : Belgrade et Semlin sont en guerre! Ce que voyant, les étudiants ont profité de cct antagonisme avec une habileté qu'on n’eût pas cru pouvoir rencontrer dans un âge aussi tendre; ils ont dit aux Marchés : — Puisque vous êtes brouillés avec les Lavoirs, qui se croient indispensables, unissons-nous et cavalcadons ensemble à frais communs. A quoi les Marchés ont répondu: — Marchons !... Et c'est ainsi que nous aurons, pour la Mi-Carême, un de ces cortégcs-rcvucs où les faits récents seront rappelés sous la forme symbolique. Il y aura, entre autres curiosités dans cette revue ambulante, un groupe des nouveautés théâtrales. Cyrano Je Bergerac ne pourra manquer d'y tenir une place prépondérante. Et si l’on est juste, on y fera aussi une part à la Culotte, du Palais-Royal. Cette pièce, qui mérite les plus hautains mépris des esthètes et des ibsémens, est d’une gaîté folle. On y rit à perdre haleine, et c était là le bienfait attendu....