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La Petite République, 19 décembre 1902

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La Petite République
19 décembre 1902


Extrait du journal

Le Figaro imagine un bourgeois de ses lecteurs impatient de voir la France par ticiper aux hostilités contre le Venezuela. Ce patriote exigeant lit dans son journal les détails du bombardement de Puerto Cabello, du blocus de Caracas. Il assiste par la pensée aux exploits des marins an glais et allemands qui, le plus héroïque ment du monde et aussi le plus impuné ment, puisqu’ils s’attaquent à des gens sans défense, capturent les quatre ou cinq vieux sabots dont se compose la flotte vénézuélienne. Assis dans son fauteuil, au coin du feu dansant, le bourgeois figariste se grise de poudre, entend gronder le canon. Il sup pute le nombre des morts. Il se pelotonne douillettement et sent un frisson d’épou vante caresser son épine dorsale. — Ah ! la guerre, le bombardement, le massacre, le pillage ; que c’est beau, que c’est glorieux ! se dit-il. Mais un chagrin le tenaille. La France, qu’est-ce qu’elle devient ? On ne la voit point dans cette gloire. Pourquoi s’abs tient-elle ? Ne devrait-elle pas en prendre sa part? Et le belliqueux rentier frémit d’indi gnation devant cet effacement de sa pa trie. Et il appelle de ses vœux ardents l’époque où elle reconquerra enfin sa place dans le monde. Il ne se demande pas si elle a un pré texte quelconque à intervenir ; si ses in térêts économiques et politiques sont lésés par le Venezuela. Non, non. Un pareil souci lui semblerait une défaillance. Que parle-t-on de prétexte, quand la victoire illumine l’horizon ? Il veut du sang, le bourgeois. Tue ! Tue ! Il souhaite à nos soldats l’heureux sort des batailles. Il le souhaite avec d’au tant plus de sincérité qu’il est lui-même hors de service, et qu’aucun des siens ne courra au danger. C’est ainsi, pourtant, que quatre-vingtdix-neuf pour cent des bourgeois français conçoivent et pratiquent le patriotisme, car le Figaro pécherait par présomption s’il prétendait que sa clientèle détient le monopole de cette espèce. Ils sont légion les patriotes du coin de feu qui, estimant que + Mourir pour la patrie, C’eat le sort le plus beau, le plus digne d'envie, poussent l’abnégation jusqu’à en laisser aux autres la jouissance exclusive. GÉRAULT-RICHARD....

À propos

La Petite République française – puis socialiste de 1898 à 1905 – fut une feuille républicaine à cinq centimes lancée en 1876 qui connut un succès relatif dans les premières années de la Troisième République. Satellite de La République française de Gambetta, les deux publications deviennent indépendantes en 1878 avant que la diffusion du journal ne s’amenuise à la mort de ce dernier en 1882.

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