Extrait du journal
me resterait à faire lorsque je serais libre. Que vais-je devenir, me disais-je, sur une terre inhospitalière, dans un pays dont je ne connais pas la langue, sans vi vres et sans ressources ? Je ne pourrai exister qu’en arrachant la vie au premier Autrichien que je rencontrerai. Tous mes sens frémirent à cette pensée. Non 1 Non î m’écriai-je, je ne tromperai pas ma main encore pure dans le sang d’un homme sans défense !... « Il me vint dans l’esprit d’emporter _ avec moi plusieurs hardes que j’avais dans ma chambre pour les vendre. Je me fis aussi une petite provision de pain, de fruits et autres subsistances. Je composai un pa quet qui pouvait peser vingt-cinq à trente livres. Insensé que j’étais ! j’aurais dû calculer que ce poids, ajouté à ma pesan teur naturelle,était capable de rendre nulle la résistance do mon parachute, j’aurais dû jeter ce ballot avant de saiiter, mais je craignais que les sentinelles, averties par le bruit, ne donnassent 1 alerte, ce qui dérangeait mon plan. Je me décidai donc à le prendre avec moi. « Je choisis la nuit du 5 au 6 juillet pour mon évasion. Je rassemblai promptement toutes mes pièces, je construisis ma ma chine et j'arrachai ma grille qui ne tenait plus qu’en apparence. Je me jette sur la terrasse et je me dispose à me précipiter en bas de la forteresse. Deux fois j'avais déjà essayé de m'élancer dans les airs, deux fois une puissance invisible sem blait me retenir, et la nature, aux appro ches de ma destruction, répugnait à suivre les mouvements de mon cœur. Enfin je recule quelques pas, puis, m’avançant à grande course et fermant les yeux, je me précipite dans l'abîme profond... « A peine avais-je quitté le haut du pa rapet que je me sentis entraîner rapide ment. Ah ! je suis mort ! m’écriai-je. Je me trompais cependant, j’éprouvai seule ment une forte commotion dont j’eus le pied gauche fracassé. Je réfléchis alors, mais trop tard, que c’était mon ballot qui avait occasionné la rapidité do ma chute. Jo l’arrachai de dessus mes épaules et j’essayai de me relever pour sauter en core une seconde muraille qui restait avant d’arriver sur le bord de la muraille. Mes efforts lurent inutiles, mon pied me refusa son secours, et je sentis alors une douleur si profonde que je fus forcé mal gré moi de pousser des cris aigus. Les sentinelles ainsi que je l’avais prévu avaient été tellement effrayées par ma chute quelles s’étaient sauvées au corps de garde et, malgré les cris douloureux que je poussai, la garde n’osa reparaître qu’au lever du soleil ; alors on me reporta dans ma prison. » Drouet avait commis une grosse faute en surchargeant son planeur du poids de ses bagages, et faillit la payer de sa vie. Mais nous ne pouvons pas ne pas admirer la merveilleuse audace, l’habileté, la vo lonté tenace, et l’éclair de génie qui illu mina ce jacobin, premier partisan du plus lourd que l’air. PIERRE NOLAY. Lire en quatrième page : UN COUP DE MAIN, conte inédit, par Olivier Seylor RETOUR AU BON SENS...
À propos
La Petite République française – puis socialiste de 1898 à 1905 – fut une feuille républicaine à cinq centimes lancée en 1876 qui connut un succès relatif dans les premières années de la Troisième République. Satellite de La République française de Gambetta, les deux publications deviennent indépendantes en 1878 avant que la diffusion du journal ne s’amenuise à la mort de ce dernier en 1882.
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