Extrait du journal

Tanger, le 22 mars 1904. Pendant que, des deux côtés de la Manche, les négociateurs de l’accord anglo-français s’occupent de faire un sort au Maroc, ici les choses continuent tout doucement leur petit bonhomme de chemin, à travers les ornières de la routine, coupées de temps à autre par les fouprières de l’imprévu. Le pittoresque y fait, il est vrai, moins souvent défaut que le raisonnable ; ainsi, dans la méthode administrative elle-même, on rencontre plus fréquemment le premier que le second. Admirez la différence qu’il y a entre le Maroc et vos pays d’Europe, dans la manière de remplacer un fonctionnaire par un autre. L’autre jour, le gouvernement impérial a voulu faire cadeau d’un nouvel administrateur aux Oulad-Saïd. Ce personnage s’est heurté, au moment de son installation, à quelques difficultés — notamment des coups de fusil. Ses administrés, qui dépendent de la région de Casablanca, n’avaient pas trouvé d’autre moyen de l’informer, qu’ils ne tenaient pas à l’avoir à leur tête. Le malentendu ne s’est d’ailleurs pas prolongé outre mesure ; le caïd contesté a réclamé le renfort d’une médailla. quant au chef de l’opposition, il s’est rendu à Fez pour fournir quelques explications : n’en est pas encore revenu....