Extrait du journal
Semipalatinsk, 21 août i855. Mon bon ami, mon cher frère Michel, Voilà déjà bien longtemps qu’il n’y a pas une seule ligne 3e toi et, comme à l’ordinaire, je commence à m’inquiéter et à me plaindre. Évidemment ce sera comme l’été dernier. Mon ami, si seulement tu savais dans quelle triste solitude je vis ici, alors, certainement tu ne me laisserais pas si longtemps dans le tourment et m'écrirais au moins quelques lignes. Sais-tu, parfois il me vient une idée pénible : il me semble que, peu à peu, le temps commence à vaincre; le vieil attachement faiblit et les anciens souvenirs s’obscurcissent et s’effacent. Il me semble que tu commences à m’oublier; comment expliquer autrement ce long délai entre les deux .lettres. Ne te fâche pas contre moi. Moi-même reste parfois longtemps sans t’écrire. Mais, premièrement, j’écris toujours plus souvent que toi et, deuxièmement, je te jure qu’il y a parfois de très sérieuses occupations. Je suis fatigué et laisse passer la poste qui ne part, chez nous, qu’une fois par semaine. Toi, c’est tout autre chose. Si c’est que, par hasard, tu n’as rien à dire, quand même écris quelque chose, ne serait-ce que deux lignes; il ne me viendrait pas en tète la pensée que tu m’abandonnes. Cher ami, l’année dernière, en octobre, à des plaintes pareilles à celle-ci, tu m’as écrit qu’il t’était triste et pénible de les lire. Mon cher Michel, pour l’amour de Dieu, ne te fâche pas contre moi. R appelletoi aire je suis seul comme une pierre rejetée; que, par caractère, j’ai toujours été triste, malade, hypocondriaque. Comprends tout cela et pardonne-moi si mes plaintes sont...
À propos
Ancienne Revue des revues, La Revue mondiale est un bimensuel culturel. Dirigée par Jean Finot, philosophe et publiciste, puis par son fils Jean-Louis Finot en 1922, journaliste et romancier, elle est sous-titrée « peu de mots, beaucoup d’idées », et se vante de publier uniquement des articles inédits de la presse française et étrangère.
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