Extrait du journal

Il y a pour les soldats les plus habitués aux vicissitudes de la guerre une chose particulièrement pénible : c’est de recommencer, à quelques mois de distance, une campagne nouvelle sur un terrain qu’ils croyaient définitivement conquis. Les plus assurés de la victoire ont alors, en se remettant en marche, un mouvement de tristesse auquel se mêle un sentiment d’amertume si parmi les ennemis du jour il leur faut retrouver les alliés de la veille. C’est une tristesse de ce genre que nous éprouvons aujourd’hui quand, à quelbues années de distance, il nous faut recommencer contre le pouvoir personnel et contre la candidature officielle une lutte que la France libérale avait le droit de croire définitivement close, et quand, au premier rang de nos adversaires, il nous faut reconnaître nombre de nos plus ardents compagnons d’armes d’autrefois. On dirait que, par ces brusques retours des choses et des hommes, les événements nous veulent rappeler l’inconstance de l’esprit humain et l’inanité des convictions individuelles, la lenteur des progrès de la raison publique et la fragilité des conquêtes du droit et de la liberté, qui jamais ne semblent assez assurées pourgn’avoir pas besoin d’être défendues....