Extrait du journal

« Et sachez qu’il se repentit fort quand il y envoya. » Le sire de Joinville clôt par cette phrase d’une syntaxe un peu rugueuse son récit de l’ambassade vaine que saint Louis, qui avait pris la croix, envoya de Nicosie en Chypre, sur la fin de 1248, vers le « roi des Tartarins », c’est-à-dire en pleine Mongolie, auprès de l’empereur Guyuk, petit-fils et deuxième successeur de Gengis-khan. Malgré ce « repentir », le roi de France, deux ans après le retour de ses premiers messagers, faisait ou laissait encore partir pour la cour mongole le cordelier Guillaume de Rubrouck, lequel n’eut pas d’ailleurs un meilleur succès. Echec fatal, a-t-on dit parfois, d’entreprises chimériques inspirées au monarque par une piété crédule. Une telle appréciation est injuste. La double tentative de saint Louis ne marque qu’un instant d’un effort qni a duré près d’un siècle, et qui a été poursuivi des deux côtés. Sans doute, en fin de compte, l’alliance des Mongols et de l’Occident ne s’est pas faite ou est restée lettre morte. Mais si Mongols et Occidentaux ont à tour de rôle travaillé si longtemps à la conclure, il faut bien qu’il y ait eu à leurs espérances et à leurs désillusions des causes plus profondes que les sentiments individuels d’un souverain ou d’un pape. C’est là un problème qui vaut d’intéresser l’historien ; je voudrais aujourd’hui, en évoquant quelques trouvailles récentes, rappeler brièvement comme il se pose....