Extrait du journal

LE THÉÂTRE CONTEMPORAIN (1) W. K ml le Augier. Le sage a dit : « Cache ta vie! » et M. E. Augier l’a entendu. Quand le succès d’une pièce nouvelle ramène sur lui l’attention, les journaux ne défraient point à ses dépens la curiosité publique et les reporters sont aussi discrets à son égard que le fut, dit-on, Japhet envers son père Noé. On n’a rien à dire sur son compte : c’est un homme de famille, un homme d’intérieur; il est comme les honnêtes femmes qui ne font point jaser. On se le représente passant doucement sa vie avec quelques amis d’élite, causant les pieds sur les chenets, et, quoique dans une de ses Pariétaires il parie de la bière et de la pipe comme de deux fidèles compagnes, on repousse bien loin ces attributs indignes d’un Immortel. Au moment de ses triomphes, un parfum de vertu se répand dans les coulisses. 11 est timide et embarrassé de sa victoire : le jour des Fouie limnbaull, Got, son intime ami, pleurait de joie; M. Augier pleurait, on apercevait dans les coins des visages silencieusement émus. Le poète ne néglige rien pour entretenir cette respectueuse sympathie : ses pièces sont dédiées à la mémoire de son père, à sa mère bienaimée, à ses sœurs, à ses vieux amis. M. E. Augier est donc un homme de mœurs patriarcales, une figure à part dans la littérature contemporaine; il y a là de quoi rejouir agréabêlement la grande Itachel, si, du séjour de ceux à qui il est beaucoup pardonné parce qu’ils ont beaucoup aimé, elle contemple encore quelquefois le cher et savant académicien....