Extrait du journal

De tous les romanciers contemporains, Emile Zola fut à la fois le plus populaire et le plus différemment jugé. Il eut quelques admirateurs sincères, des amis, des disciples; ses détracteurs ont été nombreux : presque tous les critiques et le public lettre. Son succès fut cependant très grand, mais les causes en furent diverses. On consacra d innombrables études, sous le prétexte d’analyse, d’appréciation ou d’examen, à condamner ses romans et à nier son talent ; on voulut généralement le méconnaître ou on le comprit mal. Il fit, d’ailleurs, tout ce qu’il faut pour cela. Il établit son œuvre sur une théorie qui est, à la vérité, la plus singulière des méprises, et que personne ne s’avisa de juger autrement : il ne l’abandonna jamais et la soutint avec une ardeur et une bonne foi constantes, bien que, en fait, il lui fût heureusement infidèle; l’on s’en servit pour incriminer tous, ses romans. On ne voulut pas voir ce qui faisait, mais ce qu’il disait vouloir faire : de là, une équivoque surprenante, qui n’est pas encore éclaircie. Aujourd’hui, Emile Zola appartient à l’histoire, et un effort sérieux sera nécessaire pour dégager l’âme et le sens vrai de son œuvre; il faudra la débarrasser de tout ce dont il l’a inutilement affublée, la découvrir sous 1 amas confus des théories et du système : elle vaut s’en occuper. C’est une contribution motivée à cette critique sympathique et équitable que nous nous proposons...