Extrait du journal

(3* ET DERNIÈRE LETTRE.) Monseigneur, Avant que Votre Altesse dise adieu à notre capitale, elle ne refusera pas, sans doute, d’achever, avec la Silhouette, son petit voyage à la Bourse, voyage instructif et moral, de nature à l'édifier, ainsi qu’elle en a pu juger, sur les bienfaits et les avantages de la civilisation. Revenons donc, sans plus de préambule, à nos moutons, ou bien à nos actionnaires (c’est tout comme), touchant lesquels nous n avons pas encore tout dit. Au temps dont nous parlions l’autre jour, la Bourse divisait, monseigneur, les actionnaires en deux classes : l’actionnaire dit sérieux, et l’actionnaire pour rire; et ce qui vous étonnera peut-être, c est que l’actionnaire pour rire n’était pas le moins sage des deux. L’actionnaire pour rire, ayant en général tout à gagner, parce qu’il n’avait rien à perdre, soumissionnait à droite, soumissionnait à gauche, prenait de toutes mains les promesses d’actions, qu’il s’en allait vendre avec prime à son confrère l'actionnaire sérieux. quant à celui-ci, trop timide, trop délicat, quelquefois trop fier pour compromettre sa signature au bas d’un placet de ce genre, il attendait impatiemment, sous le péristyle de la Bourse, l’occasion de troquer de beaux et de bons écus contre un chiffon de papier que l’actionnaire pour rire avait eu moyennant le prix d:un port de lettre....