Extrait du journal

par Robert LECOURT E désarmement des milices patriotiques a révélé une divergence sensible entre le Gouvernement et cer tains éléments de la Résistance. Pour la première fois se trouve posé au grand jour le problème grave des rapports nécessaires entre le Gouvernement, la Résistance et l'opinion. S'il y avait identité de vue absolue entre ces trois <élé> ments de la nation, la France serait le pays le plus /belle du monde à gouverner. Ce n'est pas, bêlas l tout à fait le cas— En attendant les futures consultations électorales, on en est réduit à deviner l’opinion à l’aide d’indices souvent fragiles. Qu’on ne s'étonne donc pas si le mécanisme de l‘Etat risque de faire entendre parfois quelques grincements fâcheux. Or la Résistance pense etre seule habilitée à exprimer la volonté de ce pays. De son côté, le Gouvernement, à qui incombent les responsabilités et à qui la France a donné des signes non équivoques de confiance, n'en semble pas entiè rement convaincu. Tel est le problèmeQue la Résistance se soit identifiée à la nation, qui le contestera ? N'est-ce pas le sentiment de tout un peuple qu'elle a expri mé par ses journaux clandestins ? N'est-ce pas le vœu pro fond de toute la résistance passive ou verbale, de l'immense résistance devant les postes de radio, qu'elle a eu Id courage de réaliser ? Et quand l'heure de la libération a sonné, n’a-t-elle pas été acclamée par la France unanime ? La Résistance, c'était donc bien la nation I Depuis lors, deux mois ont passé. L'enthousiasme de la délivrance s'est atténué. On s'habitue si vife à la liberté f Les mouvements de résistance ont considéré que leur lâche n'était pas achevée. Frappés par la lamentable expé rience des groupements d’anciens combattants de l'autre guerre, ils ont décidé de survivre à la libération et de pour suivre la lutte contre les ennemis de la liberté. Mais ce faisant, ils étaient contraints d'employer d’autres armes: car le combat s'engageait désormais sur un terrain différent : celui-là même de la politique, ce grand diviseur. Il n'est pas sûr que F opinion tout entière ait approuvé et suivi. Pouvait-il en être autrement? (LIRE LA SUITE EN DEUXIEME PAGE.)...