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L’Aube, 14 octobre 1951

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L’Aube
14 octobre 1951


Extrait du journal

L ’APPEL AU PEUPLE ERTES. la situation financière, monétaire et économique du pays, j telle que M. René Mayer l’a exposée, ne saurait nous incliner à l’optimisme. Il ne faudrait pas. cependant, qu’en poussant au noir un tableau déjà sombre, on donnât aux Français quelques raisons supplémentaires de s’abandonner au découragement. U est certain que le franc est actuellement menacé. Cela ressort clairement de l’évolution de la monnaie et du crédit au cours du premier semestre 1951. Cette évolution se caractérise par une nouvelle augmentation de la masse des billets en circulation et un accroisse ment des crédits affectés au financement de la production et des échanges. Une poussée inflationniste en résulte qu'il est nécessaire d’enrayer sans attendre si l’on veut éviter au pays de mortelles convulsions. M. René Mayer, qui est mieux placé que quiconque pour juger de l’étendue des périls, entend bien sauver le franc — mais, préciset-il, « le ministre des Finances ne défend pas la monnaie à lui seul. Si les Français veulent vraiment la défendre, elle sera sauvée. » Rien de plus vrai. Encore faudrait-il qu’on prit la peine de définir une politique financière et économique capable de provoquer un sursaut national, un élan, une levée en masse. Si l’on a trop souvent l’impression d’une absence de plan d’en semble en ce domaine on doit, plus souvent encore, déplorer le peu d'empressement des pouvoirs publics à informer la nation de sa véritable condition — et à la convier à être l’ouvrière de son propre relèvement. L'appel constant — et facile — au « deus ex machina » qui est parfois, pour nos grands argentiers, une nécessité inéluctable, a pour conséquence d’encourager la passivité publique et de stériliser des énergies qui ne demanderaient qu’à s’employer. Et cela est aussi grave que l’accroissement des billets en circulation. Mi René Mayer l’a bien senti, puisqu’il s’est adressé à tous les Français samedi soir. De tels appels doivent être souvent renouvelés. Mieux vaut dire la vérité au pays et faire appel à son courage plutôt que de le laisser dans l’ignorance et la crainte des prochaines échéances. C’est également par un dialogue constant entre le gouvernement et la nation que l’on évitera ect « effondrement politique et écono mique » auquel le journal dont M. René Pleven est le directeur fai sait allusion tout récemment. Il faut voir clairement que cet effondrement aurait pour fatale conséquence l’instauration, chez nous, du fascisme le plus virulent, le plus réactionnaire. Tout se tient. Si aux difficultés monétaires s’ajoute la démi-sion des partis républicains, le pays connaîtra à bref délai les plus dures épreuves. Craignons alors qu’un peuple las et désabusé ne préfère l’aventure à l’impuissance. Le journal de M. Pleven a eu raison de rappeler l’exemple de la République de Weimar, assassinée par la démagogie et la banqueroute. On n’a pas oublié ce qui s’ensuivit. Nous n’en voulons pas. Pierre CORVAL....

À propos

L’Aube est fondée en 1932 par Francisque Gay et Gaston Tessier. Ce journal d’opinion, d’obédience catholique et de gauche, a d’abord beaucoup de mal à rallier les catholiques démocrates du pays à cause de son positionnement pas vraiment clair entre socialisme et Église. Il arrive néanmoins à fidéliser un lectorat restreint. Pacifiste et favorable à la politique de Locarno, L’Aube fut souvent violemment attaquée par la droite catholique ainsi que par l’extrême droite, notamment L’Action française.

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