Extrait du journal

de désespoir. Elle s'élança vers la bière; elle la retint entre ses bras; elle remplit la maison de ses pleurs, de ses cris, de ses sanglots Puis soudain, épuisée, elle s'affaissa sur ses genoux ; elle s'évanouit. On l'em porta dans une pièce voisine, et l'un des assistans resta pour veiller sur elle, pendant que, le cercueil ayant traversé le vestibule et l'escalier, la tête du convoi se dirigeait processionnellement vers la paroisse de Saint-Jacques. Nous arrivâmes à l'église, la messe fut dite, la bière enlevée de nou veau par les porteuses; et le prêtre et moi, avec quelques parens, nous nQus dirigeâmes vers le cimetière , précédés de la confrérie et du jeune clerc avec sa croix d'argent, lequel, d'unè voix aigre et lamentable , en tonnait chaque antienne des psaumes. ' La beauté du jour avait attiré beaucoup de promeneurs dans la cam pagne. A l'approche du convoi, quelques curieux se joignirent à nous. On entra dans le cimetière. La bj£re fut déposée au bord de la fosse ; et, après les prières d'usage, le prêtre l'ayant béjiie , le goupillon passa de mains en mains , afin que chacun de nous l'aspergeât d'une goutte de l'eau sainte. Comme , m'étant acquitté de ce devoir , je tendais le goupillon à mon voisin, un gémissement faible, mais vibrant et d'une expression "particu lière, éclata dans la foule à côté de moi. Je levai la tête... je vis la fille de Jacques agenouillée près de la fosse. ' Elle était horriblement pâle. Elle n'avoir point esé s'habiller de deuil, mais ses vêtemens étaient d'une couleur sombre. Elle avait, en outre, caché tous ses cheveux sous sa coiffe, et un ample fichu ramassé à grands plis couvrait le haut de son corsage et tout son cou, comme une guimpe. Personne n'avait trahi le secret des amours de Jean ; aussi, cette ac tion de la part de cette femme, son abattement, son costume singulier , provoquèrent-ils quelque^ sourires railleurs dans la foule. Quant à înoi,. cédant à un entraînement involontaire, je m'avançai vers elle et lui of fris de jeter l'eau bénite. Mais elle baissa les yeux en rougissant, comme si elle ne se croyait pas assez pure pour accomplir cette cérémonie. Enfin, les trois couronnes de fleurs qu'on devait rapporter à la mère de, Jean, ayant été retirées du cercueil, on le descendit dans la fesse; e...